Housse Music

Après s'être égaré dans une pop concept tennistico-imbécile, Housse de Racket a enfin délaissé les passing-shots et les passables-songs pour livrer l'an dernier, avec "Alésia", un album qui mériterait de figurer dans les dix premiers du classement "ATPop". Montée au filet lors du Mouv’Live Grenoble, où l’on croisera aussi Tom Fire, Sandra Nkaké, et IAM. Stéphane Duchêne

« Le sport, c'est des notes et un blouson, c'est autant visuel que sonore », a déclaré dans Les Inrocks, il y a quelques temps, Sébastien Tellier, qui porte une toge-peignoir du plus mauvais effet. Une devise qu'auraient pu faire leur les Housse de Racket, Victor le Masne et Pierre Leroux, à leurs débuts. À ceci près que le duo de Chavile (situé dans cette banlieue froide de Paris où a fleuri 50% de la pop française de ces 15 dernières années) avait considéré qu'en été, un blouson, ça tient chaud. Mieux vaut un short, un bandeau à visière, des poignets en éponge et, au cas où on aurait envie de faire un tennis, une raquette.


French Touch

Bref, on a un peu cru à la blague potache (il suffisait pour cela d'écouter leur titre Champions, qui aurait fait un excellent générique de série animée japonaise sur le tennis), mais pas la presse musicale qui a tout de suite pris la chose au sérieux, le duo débarquant sur les plateaux télés avec leur raquette et leur uniforme mi-McEnroe, mi-McDo. Côté musique, s'il fallait reconnaître un savant mélange, plutôt efficace – quoi qu'un peu putassier – d'inspiration house (de racket, lol) et de pop à la Phoenix (le groupe, pas la ville), on goûtait moins les paroles en français un peu pourraves. Ce qui n'empêcha guère le petit succès en 2008 de Forty Love et du single Oh Yeah ! – que Le Grand Journal de Canal +, qui l'utilisait comme musique d'attente, a fini par nous rendre insupportable. Succès qui s'étendit à l'étranger, où l'on ne comprenait pas un traître mot de tout ça, mais où le terme French Touch – qui est à la musique Made in France ce que Borotra, Lacoste et consorts sont à son tennis : un fossile aux allures de Sainte relique – jouit d'un extraordinaire phénomène de persistance rétinienne et cochléaire. Là, alors qu'on allait remballer les housses et les poignées en éponge, Housse de Racket dégaine début 2011 Alésia. On pense alors à ce pauvre Vercingétorix – qui a déjà connu la douleur d'être interprété au cinéma par Christophe Lambert ; qu'on le laisse un peu tranquille – et on s'apprête à passer à autre chose, parce que c'est bien connu, comme dirait Agecanonix : « On ne parle pas d'Alésia, personne ne sait où se trouve Alésia ! ». On n'était donc parti pour ne pas en parler.


Human Nature

Sauf que, dès le départ, cet album-là sonne comme une victoire, une Coupe Davis 1991, un Gergovie pop. C'est là où est sans doute le clin d'œil d'un groupe qui a compris, en bon français, qu'il est toujours plus avantageux de ne pas partir favori. Et quand on dit victoire, ce n'est pas le genre au tie-break du quatrième set avec l'aide d'un filet mal tendu face à Edouard-Roger Vasselin (67e à l'ATP). Car il n'est plus question de jouer à la baballe mais à la pop intergalactique noyée de synthétiseurs et de mélodies folles. Est-ce donc l'arrêt du tennis, l'apprentissage de l'anglais – même les titres en français ne sont plus, enfin moins, embarrassants, si l'on passe sur Les Hommes et les Femmes, dont le refrain sent un peu la fracture d'inspiration – la production de Philippe Zdar (déjà aux manettes du génial Wolfgang Amadeus Phoenix de Phoenix – toujours le groupe, pas la ville), qui donnent à l'ensemble cette tenue atmosphérique saisissante et néanmoins dansante ? Housse de racket joue ainsi quelque part entre Tellier, donc – sans les moments gênants en peignoir avec des gens qui se frottent en mangeant des pépitos bleus – ; l'efficacité pop de Phoenix (encore le groupe, pas la ville) ; les atmosphères 80's du born-again électronicien Kavinsky ; les diableries fourmillantes de The Shoes et quelque chose qui ressemblerait à ce à quoi New Order ressemblerait aujourd'hui si New Order ne ressemblait pas à ce à quoi il ressemble. Vous suivez ? Non ? Tant pis, de toute façon, avec Housse de Racket, vous êtes condamnés à faire l'essuie-glace en fond de court. Rien que ça, c'était pas gagné.

Housse de Racket, jeudi 5 juillet, au parc Paul-Mistral. Dans le cadre du Mouv'Live @ Grenoble

 

ENCADRÉ

Le cas IAM

Pour nous, le Mouv’Live, c’est Housse de racket, donc. Oui, on est un peu taquins, aimant bien les contre-pieds. Et surtout, avec IAM, on est bien embêtés. Car IAM, c’est évidemment le monumental, voire le carrément pharaonique L’École du micro d’argent, classique du rap français émaillé de petites bombes (ah, le Petit frère qui ne boit plus de sirop Teisseire mais des bières!). Un album sorti en 1997. Et puis plus rien. Enfin pas tout à fait ; mais rien de la même force. Donc IAM en tête d’affiche d’un grand concert en 2012 ? On nous aurait annoncé ça en nous demandant notre avis qu’on aurait bien ri. Puis la Ville de Grenoble l’a fait. On a été interloqués. Et l’on ira juger sur pièce pour voir si elle a eu raison (même si certains ont déjà eu des éléments de réponse il y a deux ans à Rocktambule). Les paris sont lancés. AM

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