Exilé

Mercredi 18 juillet 2007

de Johnnie To (Hong Kong, 1h40) avec Anthony Wong, Francis Ng, Simon Yam...

Encenser un réalisateur à répétition peut parfois provoquer un effet inverse à celui escompté. Estampillé valeur sûre, le cinéaste est alors boudé par la frange la plus défricheuse du public, toujours avide de nouveauté. Tant pis, on passe outre : après le somptueux diptyque composé par Election 1 & 2, Exilé est une nouvelle franche réussite pour le Hongkongais Johnnie To, aussi magnifique qu'ouvertement jouissive. Situé à Macau en 1998, un an avant la rétrocession, le film débute sur le retour de Wo dans cette ville qu'il a fui après une rixe avec son ancien employeur, le cruel «boss Fay». Deux de ses anciens acolytes sont dépêchés pour l'exécuter. Déjà guère motivés, ces derniers constatent en arrivant à son domicile que deux autres collègues de Wo ont également fait le déplacement, quant à eux pour protéger leur ami... On n'en dévoilera pas plus sur ce polar atypique au rythme nonchalant, mais riche en rebondissements. Pour autant, c'est avant tout aux subtiles et ambiguës relations unissant ses personnages que s'attache Johnnie To. Un sens de la nuance rare qui s'applique d'ailleurs à l'ensemble des éléments du film : la mise en scène est ultra léchée, notamment lors de scènes de fusillades haletantes, mais ne vire jamais à la stylisation outrancière d'un John Woo avec croix chrétiennes et colombes volant dans les flammes. Le film flirte sans cesse avec le mélo sans jamais verser dans le larmoyant, et avec le film d'auteur sans jamais sombrer dans le contemplatif pesant. Cette finesse et cette élégance si rares, associées au soin porté par le cinéaste à chacun de ses personnages et à un goût pour l'insolite qui se confirme de film en film, font d'Exilé une œuvre à part, à découvrir sans hésitation. Damien Grimbert