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Nous avons gardé un silence coupable dans ces colonnes à la sortie de Beowulf ; il faut dire que le film s'est franchement ramassé en France, à part dans les quelques salles qui le programmaient en 3D. Toute l'ambiguïté de ce drôle de film est là : derrière un produit technologique hi-tech se cache un film d'héroïc fantasy extrêmement intègre, mais les deux s'entredévorent sur le grand comme sur le petit écran. Impossible d'occulter les limites de la motion capture, ce procédé qui consiste à faire jouer des acteurs puis à les recréer en animation 3D, en conservant seulement les voix et les expressions du visage. Dans Beowulf, le procédé conduit au meilleur (la créature sublime et pathétique «composée» par Crispin Glover, les grands mouvements d'appareil impossibles à réaliser en prises de vue réelles), mais aussi au pire (trop de graphisme tue le graphisme, et c'est encore plus frappant en DVD, à la limite de la lisibilité). En revanche, on est impressionné par la dimension mythologique du récit, la figure de son héros, mercenaire sauvage et sans pitié qui finit tout de même par succomber à l'appel de la chair et du désir, et les notations gonflées, notamment sur la religion chrétienne. Si Zemeckis a, grâce à cette technique, achevé le travail qu'il menait depuis 25 ans sur le corps réinventé par la technologie, c'est bien grâce à ses deux scénaristes (Roger Avary et Neil Gaiman) que son cinéma trouve un nouveau souffle, épique et barbare.
CC