Food / Les halles municipales ont rouvert, après une intense (éco)rénovation. On y trouve une épicerie, un dealer de jus, un poissonnier, une crêperie et un bar à vins et tapas, ayant pour mantra commun l'alimentation durable.
La halle millésimée 1838 était devenue le serpent de mer de la Martinière. Voilà près de quinze ans qu'il était question à son propos de changement. La mairie projeta d'abord de privatiser le bâtiment - on murmura le nom de Casino, voire de Bahadourian. Pour diverses raisons, notamment la mobilisation d'habitants du quartier, le projet fut ajourné puis abandonné, ce qui n'empêcha pas la halle de se vider de ses commerçants et de finir par fermer. Furent alors évoqués plusieurs projets de reprise, dont l'un, en 2013, mené par des producteurs de la région - qui échoua, encore.
Finalement, il fallut l'intervention d'Etic, un créateur et financeur de projets immobiliers "responsables", pour que la perspective d'une réouverture devienne crédible. Avec un bon million d'euros d'investissements et un an de travaux, les murs en béton et l'amiante posés dans les années 60 ont disparu, les colonnettes en fonte et leurs paniers de fruits ont réapparus, et le bâtiment a regagné des couleurs, ou plutôt de la lumière.
Il est aujourd'hui cerclé de grandes baies vitrées qui laissent apparaître depuis l'extérieur, non plus des "halles" au sens du Larousse (« le marché central des denrées alimentaires d'une ville ») mais un ensemble de projets nourrissants et très dans l'air du temps (écodurabloresponsable). L'espace est séparé en deux : d'un côté un magasin biologique, de l'autre un "food court" : un espace partagé entre différents stands de restauration. Sur le papier, tout cela peut sembler un peu ovniesque. Pourtant, si on ne se laisse pas obnubiler par le côté flambant neuf, on constate dans cette grande boîte de l'énergie et des convictions.
Les épicières tâchent de mettre en avant des produits du coin, qu'elles apprécient autant que ceux qui les fabriquent. On trouve sur leurs étagères des bocaux de cardons de Communay, de la bière du Beaujolais, du miel, de l'huile de tournesol et de l'agneau de la Loire. L'étal de poissons est tenu par La Criée des Monts d'Or et privilégie la pêche de petit bateau ou l'élevage bio. En face, Moi Pur Jus délivre des cures de jus extraits à froid, des cakes sans lactose ni gluten, et des soupes chaudes pour l'hiver.
Côté restauration on retrouve deux bretons, qui transportaient jusqu'à présent leurs biligs associatifs (la Crêperie Clandestine) et leur farine de sarrasin (moulue à la pierre dans l'Ain) dans les festivals et salons de la région. Et qui donc se sédentarisent sous le nom de Madamann. Enfin, il y a El Bar des Halles, en acier brossé, derrière lequel La Cuisine Itinérante envoie tapas et pinards naturels.
Impossible, ici, de faire l'inventaire de tout ce qu'il est donc possible d'engloutir six jours sur sept, de 8h à minuit. Permettons-nous seulement quelques recommandations : le matin, il ne faut pas manquer les petits sandwichs posés sur le comptoir, dont un excellent mini-bun noir garni de tofu mariné à l'orange emballé dans une feuille de chou.
Au déjeuner, les gourmands peuvent se (re)tourner vers une très synergique galette à la truite fumée, sauce ciboulette et poêlée de poireaux, chou et carottes (le poisson, comme les légumes ayant été chinés ici-même) et les curistes vers une soupe aux épinards et épices douces.
Le soir, il faut se laisser aller à tapasser sans limite, en commençant par la déjà-classique big part de tortilla (pimpée à la patate douce et aux topinambours) servie pour 5€ (!) avec un verre de pif. Il serait dommage d'ailleurs d'esquiver la carte des vins, qui envoie du lourd à des tarifs raisonnés. Peut être est-ce à cause des premières neiges, mais on se plaît déjà à imaginer, dans quelques mois, un combo terrasse-tapas, amis et pot lyonnais (d'Aligoté de Derain) : imparable !
Halles de la Martinière
23 rue de la Martinière, Lyon 1er
De 10h à 20h pour l'épicerie (fermée le dimanche)
De 7h45 à minuit pour le food court