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Pierre Guillois : « Faire marrer les gens, c'est notre travail ! »

Pierre Guillois : « Faire marrer les gens, c'est notre travail ! »
Les gros patinent bien

Célestins, théâtre de Lyon

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Théâtre / Un gros homme, statique sur scène, se lance dans un impressionnant voyage grâce à un maigre acolyte qui matérialise avec des cartons tout un tas d'accessoires, de paysages, de compagnons de route... Signé Olivier Martin-Salvan et Pierre Guillois, "Les Gros patinent bien, cabaret de carton" est un bijou burlesque au succès phénoménal mérité depuis sa création en 2020. Ça valait bien une interview (de Pierre Guillois) avant les quatre semaines de représentation aux Célestins.

D'où vous est venue cette curieuse idée de spectacle ?

Pierre Guilllois : Ça a commencé par le fait... qu'on n'avait pas d'idée ! Avec Olivier, on s'est retrouvés en répétition sans savoir exactement quoi faire. On a très vite brodé autour de l'idée stupide d'écrire des choses sur des cartons. Ça a tout de suite marché. Les gens adorent parce que leur imaginaire est ultra sollicité : on leur écrit "montagne" ou "grue cendrée" sur un carton, à eux de voir la montagne et la grue cendrée !

Le titre Les Gros patinent bien, imaginé avant la création, a également été un point de départ...

J'adore les titres, j'en ai toujours plein ma besace. Au moment où l'on a commencé à travailler, avant même l'idée des cartons, Olivier m'a dit de choisir celui-ci. Car notre première forme de quarante minutes a vu le jour dans les jardins du théâtre du Rond-Point à Paris, et il se trouve que le Rond-Point est une ancienne patinoire. Ce titre nous a donné le début de l'histoire. On s'est alors dit : autant véritablement faire patiner ce gros monsieur. On l'a mis en Islande sur un lac gelé puis on a tiré des fils...

Des fils très visuels, puisqu'il n'y a pas de texte dans le spectacle. Du moins pas de texte écrit...

Ce qui conduit la pièce, c'est le rapport entre les deux personnages : un gros acteur – manifestement l'autorité – qui ne bouge pas et un autre – le factotum – qui s'agite dans tous les sens, en slip, pour mener à bien le spectacle. Et le spectateur va très vite comprendre qu'il ne comprendra pas le langage du gros monsieur, sorte d'anglais ou d'américain sans en être ! À part quelques rendez-vous précis, ce langage est tout le temps inventé par Olivier à l'intérieur d'une structure précise et millimétrée – sur ses réactions, ses sentiments, ses émotions... Concrètement, quand il semble dire "oh quel bel oiseau je vois au loin", son intention est extrêmement précise, mais le son est différent chaque soir.

Votre partition à vous est également millimétrée...

Il y a deux personnes en coulisse qui, pendant six heures avant la représentation, rangent méticuleusement les 500 cartons afin qu'ils soient exactement au bon endroit dans le bon sens et qu'une certaine chorégraphie se développe en lien avec la partition d'Olivier. C'est donc, oui, pour Olivier comme pour moi, une partition vraiment rigoureuse pour faire marrer les gens. C'est ça notre travail !

Vos partitions sont rigoureuses mais vous communiquez tout de même un plaisir presque enfantin de jeu...

Enfantin, tout le monde nous le dit... Ce n'est pas vraiment ça. Certes, ce dispositif basique d'invention rappelle nos jeux d'enfant où l'on s'amusait avec n'importe quoi grâce à notre imagination. Mais l'adulte oublie que c'est possible à tout âge ! Un adulte a la même capacité d'imaginaire qu'un enfant, il le prouve d'ailleurs en riant chaque soir avec nous.

C'était le sens de votre discours, écrit sur des cartons (forcément) lorsque vous recevez un Molière en 2022 et demandez : « En ces temps moroses, pourquoi ne pas considérer le rire comme une grande cause nationale ? »

On a pris le même soin à construire ce spectacle dans la forme et dans le fond que si on travaillait, par exemple, une tragédie. C'est ça qu'on a voulu raconter avec Olivier aux Molières : la tradition du théâtre français plutôt portée sur le texte a souvent mis de côté, voire méprisé tout ce qui était de la comédie, du burlesque, pour construire un théâtre d'art. C'est dommage. Après, on est aussi la preuve que ce n'est pas si vrai vu qu'on est beaucoup programmés depuis 2020 ! Le 31 décembre, on célèbrera d'ailleurs la 600ᵉ représentation à Lyon et à Paris, comme il y a maintenant quatre distributions qui peuvent jouer en même temps [Olivier Martin-Salvan et Pierre Guillois seront à Lyon la semaine du 19 au 23 décembre].

Au vu du succès, vous pouvez imaginer faire tourner le spectacle longtemps en France. Voire, vu sa forme, l'emmener à l'étranger...

Tout à fait. L'été dernier, nous étions en Écosse, à Edimbourg. Nous avions traduit tous nos cartons en anglais. Ça a été un immense succès, et ça a prouvé que l'humour du spectacle peut traverser les frontières. Maintenant, on travaille sur le développement à l'international. On va probablement aller en Australie, aux États-Unis, en Islande, en Chine... Ce n'est pas prêt de s'arrêter !

Les Gros patinent bien
Au Théâtre des Célestins jusqu'au samedi 6 janvier

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