Puy-de-Dôme / À l'occasion de la réouverture de son magnifique centre d'art contemporain du Creux de l'Enfer qui a doublé sa superficie, destination Thiers ! Accroché à la roche, en bord du parc régional du Livradois-Forez, la capitale du couteau se réinvente dans cette ère post-industrielle.
Elle se dévale, elle s'escalade comme l'ont fait en 1976 les gamins de L'argent de poche filmés par François Truffaut. Thiers, troisième sous-préfecture du Puy-de-Dôme (après Riom et Issoire) se répartit sur 500 mètres de dénivelé entre la vallée des Usines et son plateau (à 793 m) !
Forte de 12 000 habitants, la cité mondialement connue pour la fabrication de couteaux, n'est a priori pas en grande forme avec ses nombreux magasins fermés et surtout cette ribambelle d'usines vidées à ses pieds. Mais il ne faut pas s'y fier. Thiers a toujours eu de la ressource et ne capitule pas. Son maire, le divers-gauche et physicien Stéphane Rodier, le rappelait à l'occasion d'une visite de chantier du centre d'art contemporain le 16 mai dernier : « la ville a toujours été liée au grand commerce, comme en témoigne le fait que sa population n'a guère évolué entre l'époque du bas Moyen-Âge et aujourd'hui ; le pouvoir bourgeois s'est ici tôt substitué au monde féodal ». Cité des tanneurs, des papetiers, des scieurs avant que les couteliers ne les remplacent, Thiers recèle de bâtiments ouvriers toujours debout, même s'il n'en reste souvent que les murs. C'est dans l'un – et maintenant deux – d'entre eux que s'est installé le centre d'art contemporain du Creux de l'Enfer (voir ci-contre), hautement soutenu par l'édile. Ce n'est pas si fréquent par les temps nauséabonds qui courent.
Et désormais, les industriels posent de nouveau leurs valises dans la cité. C'est le cas du joaillier Van Cleef et Arpels qui vient d'embaucher 80 salariés ; ils seront bientôt 300. La page noire des années 1990-2000 aux multiples fermetures se tourne. Le centre-ville se refait une beauté (rue Conchette) et l'hôtel particulier du Pirou porte haut six siècles d'histoire dans ses pans de bois et sa pierre de Volvic.

Chemin des Rouets
Mais à Thiers, la coutellerie est toujours en forme puisque 90% de la production française est faite ici, engendrant 2000 emplois. Et l'un des salons les plus courus au monde en la matière se déroule dans la ville chaque année en mai, Coutellia. Partout, dans les vitrines des couteliers de la ville, on peut voir des figurines des émouleurs. Jusqu'à l'invention de l'électricité, ces hommes se sont couchés au bord de l'eau, les bras tendus en avant vers une meule de grès pour limer des bouts de métal et confectionner des lames, leur chien couché sur leurs jambes pour leur tenir chaud. Pour s'en rendre compte, il faut se rendre chemin des Rouets, ces moulins à aiguiser actionnés par une roue hydraulique métallique. Dix-huit se trouvent au bord du filet de rivière, dont "Chez Lyonnet", le dernier à avoir fermé, en 1976. Il est visitable l'été. Deux balades s'offrent à vous depuis Château-Gaillard, à 4 km de Thiers : une boucle de 30 min et un parcours aller-retour d'une heure. Pour plus de renseignements, filez au musée de la Coutellerie, dans le centre-ville de Thiers.

Chemins de traverse
Si vous êtes en voiture, n'hésitez pas à pousser jusqu'au très beau village médiéval de Billom, cité des cultivateurs d'ail (rose notamment). Chaque mi-août, une grosse fête y est organisée à la fin de la récolte. Et pour une balade pleine nature, visez le Puy Saint-Romain depuis le village de Saint-Maurice : boucle de 2h35, 6 km et 300 m de dénivelé positif pour atteindre, à 776 m d'altitude, une vue à 360° sur la vallée de l'Allier, les Monts du Cantal, le Mont-Dore, le Puy-de-Dôme en majesté, Clermont-Ferrand, le Livradois et le Forez. Magnifique ! Il n'y a qu'un fléchage sommaire, mais le site web (ultra fiable) VisoRando sera votre guide.
Le Creux de l'Enfer on fire
Ouvert en 1987, le Creux de l'Enfer compte parmi la cinquantaine des centres d'art contemporain français, et les trois de la région (avec Grenoble et Annemasse). Depuis 2019, il est reconnu "d'intérêt national" par l'État pour son excellence tant dans l'accompagnement des artistes (c'est un lieu de résidence) que pour la qualité de transmission des savoirs (lien très étroit avec le lycée technique de la ville notamment). Le 27 juin, il rouvre et double sa superficie, désormais étendue à l'usine (très) voisine du May datant de 1890. Le parcours n'est plus une boucle, mais une véritable déambulation entre ses deux lieux jusqu'à la boutique-librairie flambant neuve. 68% d'économie d'énergie sont faites dans ces murs qui laissent passer une incroyable lumière et deux espaces extérieurs (dont un toit-terrasse) ont été aménagés pour recevoir des œuvres. Au programme de cette expo collective nommée In vivo, des figures de renommée mondiale qui ont marqué l'histoire du lieu : Hubert Duprat, Mona Hatoum, Ann Veronica Janssens, Roman Signer et Georges Trakas. Il y a également sept autres artistes de la nouvelle génération résidents de diverses villas artistiques type Villa Médicis et enfin trois qui ont mené un travail sur le territoire.
Exposition Retour en enfer, au Centre d'art contemporain de l'Usine du Creux de l'Enfer (Thiers).
Du 28 juin 2025 au 8 mars 2026. Ouvert du mercredi au dimanche de 14h à 18h ; 3 à 5€
Où manger ?
Au chaudron. Très bon resto de produits locaux. Menu de pays à 21€, truffade ou Saint-Nectaire fondant, charcuterie de pays ou saucisse au choux et dessert.
10 rue Denis Papin. Ouvert du mercredi au samedi midi et soir + dimanche midi
Les GoûThés d'Olivier. Idéal pour les formules midi (soupe, tarte salée, dessert et café pour 14€ dans de la vaisselle de grand-mère si jolie). 100% fait maison et 90% en bio. Et bouquins de Marie Darrieussecq, Sartre et plein d'autres à disposition.
29 rue Conchette. Ouvert du mercredi au samedi de 9h à 18h
Jours de marché
Mercredi (place de l'Europe), jeudi et samedi (place Antonin Chastel)
À voir aussi à Thiers
Tiers-lieu Croix de fer. Centre de pratiques artistiques et culturelles contemporaines CPACC, rebaptisé 1103 qui abrite différentes pratiques artistiques.
Festival Pamparina. Concerts gratuits. Les 4, 5 et juillet 2025.
Foire du pré. Fête traditionnelle et foraine de la ville. En septembre.
Comment venir depuis Lyon ?
En voiture : 128 km et 1h30 par l'A89 ou 132 km et 2h20 par la D1089 via Feurs
En transports publics : Flixbus jusqu'à la zone industrielle du Felet ou autocar depuis la gare de Saint-Étienne Châteaucreux
