Pattaya

Reconstituant un trio de Kaïra, Franck Gastambide s'envole pour la Thaïlande, histoire de voir si la misère sexuelle est moins pénible au soleil. S'il n'entame pas son goût pour un humour trash ne se cachant pas derrière son petit doigt, l'exotisme semble l'avoir (un peu) poli…


Le succès mérité des Kaïra (2012) dans les salles rendait mécanique la mise en chantier d'un équivalent de suite. Car si la nature a horreur du vide, un producteur normalement constitué abhorre ne serait-ce qu'envisager l'idée d'abandonner l'esquisse d'un potentiel profit supplémentaire. Par son cadre de départ, son esprit décalé, sa triplette gagnante (l'abruti à casquette / l'Arabe / le Nain), Pattaya s'inscrit dans la continuité du film précédent. Toujours devant et derrière la caméra, Franck Gastambide fait figure d'exception dans le trio, les autres têtes d'affiche étant substituées.

Séquelle façon Canada Dry, Pattaya recourt dans sa première partie à la formule héritée de la pastille télévisuelle Kaïra Shopping, qui avait fait des Kaïra une réussite originale : son traitement trépidant et de l'intérieur des cités, sur un mode comique rugueux et sans pincettes, au risque d'écorcher la bienséance si éloignée du quotidien réel.

Boxe thaï, petites tailles et racailles

Gastambide excelle en effet dans ce mode “chroniqueur”, enchaînant les anecdotes et les méchefs vécus par les habitants de son quartier — il se montre bien plus percutant que Samuel Benchetrit, poète du ras de l'asphalte. Tournant en dérision les filles trop voilées et les petits mecs obsédés par leur apparence ou leur désir d'une notoriété à tout crin, il juxtapose une série de portraits incisifs et caustiques. L'effet zapping en résultant, renforcé par une liste longue comme le bras d'invités, rend compte de la diversité mosaïque du décor urbain.

Il perd ici cette dimension en s'exilant en terre inconnue à Pattaya, et surtout en incorporant une star supplémentaire à sa distribution. La présence de Gad Elmaleh ressemble à une concession, une ouverture consentie à un public plus large : le comédien paraît se livrer à de gentillettes impros maison (des citations de Patrick Bruel…), très éloignées de l'humour émeri de Gastambide. C'est un choc de cultures, pas vraiment profitable au film : les séquences gouvernées par l'incorrection, la scatologie, la franche bêtise s'avèrent les plus drôles. Or, coïncidence, Gad Elmaleh n'y figure pas… VR

Pattaya de et avec Franck Gastambide (Fr, 1h37) avec Malik Bentalha, Anouar Toubali, Sabrina Ouazani…


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