Kings

de Deniz Gamze Ergüven (Fr-E-U, 1h32) avec Halle Berry, Daniel Craig, Kaalan Walker…


Mère courage, Millie accueille sans compter tous les gamins à la rue. Si la tension est continue entre les forces de l'ordre et les habitants de son quartier de Los Angeles, la tenue du procès des policiers ayant tabassé Rodney King déclenche des émeutes. Et Millie a peur pour ses enfants…

Le succès international de Mustang ayant ouvert grandes les frontières à sa réalisatrice, celle-ci a consenti à franchir l'Atlantique… sans pour autant succomber à l'appel des studios : projet personnel porté de longue date, Kings n'aurait sans doute pas correspondu, dans sa forme et son fond, aux critères hollywoodiens. 

Volontiers hybride avec ses surimpressions visuelles, ses inclusions d'images d'actualités, ses parenthèses lyriques, drolatiques ou abstraites venant éclater le réalisme contextuel, cette chronique chorale d'un quartier populaire rappelle la tension moite et revendicative des Spike Lee ou John Singleton d'antan, autant qu'elle évoque le regard sur l'adolescence de Larry Clark — en plus soft, tout de même ! Des nuits orangées aux coiffures délirantes en passant par les jeans délavés, Deniz Gamze Ergüven restitue la texture et la manière d'une époque plongée dans un chaos brûlant. 

Un détail pourtant entrave une pleine immersion parmi ses personnages : son choix d'avoir confié ses têtes d'affiche à des comédiens cannibalisés par leurs emplois passés. Difficile en effet d'accepter Halle Berry et Daniel Craig en prolos du coin, quand on a coutume de les voir en robe du soir et smoking…

 


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La mémoire dans le faux : "À l’heure des souvenirs"