L'homme de lotissement !


Vincent Charboin est un homme de lotissement. Marié, deux gosses, un Xsara Picasso, un garage et un jardin de 133 m² qu'il tond consciencieusement deux fois par mois ! Vincent est bricoleur et travaille en tant que responsable d'agence au Crédit du Nord, il est payé 2387, 56 euros Net par mois, hors primes, ce qui lui permet de partir en vacances de la même manière depuis 17 ans, à Valmorel en février et au Grau-du-Roi en août. Il prend l'apéro le vendredi à heure fixe avec Cédric Berlot, un autre homme de lotissement. Mais Vincent Charboin a un secret, il n'est pas Vincent Charboin ! Il y a 20 ans, il s'appelait Julien Tomasini et avait monté un groupe de rock avec tous ses petits copains macaronis, « Billy Rockett and the Snakes », Julien étant évidemment le fameux « Billy Rockett ». La formation a commencé à avoir son petit succès sur Roubaix tant et si bien que le groupe se comportait comme des rockstars ! Billy était toujours défoncé (alcool, coke, LSD, exta, keta avec râbla et beuh pour s'endormir...), il forniquait des groupies dans le van qui sentait la transpiration et le kebab. Au niveau de la tenue c'était collant léopard, tiags, le Perfecto de sa mère, torse nu, sautoir africain, maquillé à la Kiss et perruque blonde ! Un esthète le Billy ! Et puis un soir alors qu'il s'était écroulé sur scène en plein milieu de la première chanson comme d'habitude, on le ramena dans le van. Il dormait quand il sentit qu'on le prenait en bouche. Au premier réflexe, il caressa la tête de la généreuse quand il s'aperçut que les cheveux étaient en brosse. Il bondit d'un coup et vit un garçon avec des yeux plein de tendresse ! Billy sortit son couteau papillon et lui planta dans le cou direct sans réfléchir. Il commença à rassembler ses esprits, fit démarrer le van et roula en direction du Bois de Monzil. Quand il s'arrêta le garçon était déjà mort. Billy l'enterra mais récupéra juste ses clopes et son lard-feuille. Il s'appelait Vincent Charboin. Ses parents l'avaient viré « On veut pas de pédé par chez nous sale travelo ! », sans ami, il était juste fan de « Billy Rockett and the Snakes » et surtout très amoureux du chanteur... Julien, au départ par amusement prit son identité puis il se piqua au jeu, il coupa les ponts avec tout le monde, plus de musique, il arrêta la défonce, trouva un poste de p'tit conseiller au Crédit du Nord, se maria avec une femme de supermarché et laissa filer sa vie comme ça...parfois quand ses enfants disent qu'il n'est pas très rock'n roll il se marre un peu derrière sa moustache...


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Dalby, une librairie de quartier