Caché

Mercredi 12 octobre 2005

de Michael Haneke (Fr-Aut-All-Ita, 1h55) avec Daniel Auteuil, Juliette Binoche, Maurice Bénichou, Annie Girardot...

La rue, une maison, de rares passants... Le premier plan de Caché est en fait tiré d'une vidéo que Georges (Daniel Auteuil) et Anne (Juliette Binoche) trouvent sur le pas de leur porte. Une image fixe qui, entre autres rituels urbains, capte les allées et venues de la famille. La cassette, accompagnée d'un dessin morbide, sera suivie par d'autres, d'abord conçues selon le même dispositif, puis s'en éloignant pour s'enfoncer dangereusement dans le passé enfoui de Georges. La répétition du quotidien, le voyeurisme, l'omniprésence des images dans la société contemporaine... Haneke renoue ici avec ses bonnes vieilles obsessions et leur offre un nouveau terrain de jeu : une bourgeoisie médiatique parisienne (Georges présente une émission littéraire à la télé, Anne est dans l'édition) qu'on a plus l'habitude de voir confrontée à de triviaux drames adultérins qu'à une irrationnelle montée d'angoisse. Ici, c'est à la seule force des dérives interprétatives du couple que la tension s'installe ; à la seule volonté d'une mise en scène serrée (justement primée à Cannes) qui montre peu et n'explique rien. Le mystère et l'inquiétude enflent pas à pas, séquence après séquence, dégraissés des considérations terre-à-terre qui, trop souvent, plombent les tentatives françaises du genre (et bien aidés par la prestation hallucinée de Maurice Bénichou). Que la direction d'acteur semble hasardeuse et que certains dialogues sonnent parfois un peu faux (parti pris ou barrière de la langue ?) ne change rien au fait que Caché est une redoutable machine à mauvais rêves.Emmanuel Alarco