La Marche de l'empereur

par Christophe Chabert
Mercredi 2 février 2005

de Luc Jacquet (Fr, 1h25) documentaire

L'overdose de faux docus vraiment cuculs estampillĂ©s WWF sur la nature, les animaux et les derniers trappeurs laissait craindre le pire concernant ce "conte" de la migration en milieu polaire Ă  base de pingouins (pardon, de "Manchots empereurs"...). Excellente surprise ! La Marche de l'empereur surclasse largement ses prĂ©dĂ©cesseurs, tant au niveau narratif qu'Ă©motionnel. Son rĂ©alisateur, Luc Jacquet a raison de laisser modestement au gĂ©nĂ©rique le crĂ©dit du scĂ©nario Ă  sa colonie en mouvement, car la simple description de leur lutte pour la survie et la prĂ©servation de l'espèce est en soi terriblement touchante. Longue traversĂ©e des Ă©tendues glacĂ©es, formation des couples, naissance des œufs, transmission pĂ©rilleuse de la mère au père, danger mortel des monstres marins hantant les profondeurs oĂą les femelles doivent aller chercher les vivres pour nourrir leur progĂ©niture, petits lancĂ©s dans le blizzard et Ă©pier par les prĂ©dateurs... Chaque sĂ©quence possède une intensitĂ© dramatique qui met frontalement en lumière la rude cruautĂ© de cette sĂ©lection naturelle. La voix-off (avec le trio Romane Bohringer-Charles Berling-Jules Sitruk) et la musique d'Émilie Simon (moins agaçante que d'habitude) se chargent d'insuffler une poĂ©sie douce et entĂŞtante Ă  ce film lumineux, fable sur la vie et la mort dont la beautĂ© irradiera par-delĂ  le cercle familial auquel ce type de production est ordinairement destinĂ©.Christophe Chabert