Philippe Claudel
Le Rapport de Brodeck
(Stock)On retrouve avec Le Rapport de Brodeck les thèmes qui hantaient Les Ă‚mes grises et La Petite Fille de Monsieur Lihn dans lesquels Philippe Claudel abordait plus ou moins directement les guerres de 14-18 et d'Indochine. La guerre, donc, mais aussi la haine de l'autre, le syndrome du bouc Ă©missaire, le poids de la culpabilitĂ©, l'inhumanitĂ©, l'horreur absolue sont au cœur de ce roman parabole que Philippe Claudel a choisi de ne pas situer prĂ©cisĂ©ment. L'action se dĂ©roule dans un petit village qui pourrait se trouver dans l'Est de la France, en Autriche ou ailleurs (un peu partout, en fait), au lendemain d'un conflit qui ressemble de très près Ă la seconde guerre mondiale. Survivant des camps de la mort, Brodeck revient dans le village oĂą, quelques mois plus tĂ´t, il fut pourtant dĂ©noncĂ© par ses voisins. Ces mĂŞmes villageois, qui viennent d'assassiner un Ă©tranger dont la prĂ©sence Ă©tait interprĂ©tĂ©e comme une menace, lui demandent de rĂ©diger un rapport destinĂ© Ă expliquer et excuser leur geste. En Ă©crivant l'histoire de celui qu'il appelle l'«Anderer» (l'autre), Brodeck va mettre Ă nu les mĂ©canismes cruels de la nature humaine, et dĂ©couvrir que l'Ă©criture est aussi pour lui un moyen de mettre des mots sur son expĂ©rience personnelle et l'horreur qu'il a vĂ©cue. Fable humaniste servie par une maĂ®trise romanesque particulièrement impressionnante, ce Rapport de Brodeck est un livre d'une rĂ©elle intensitĂ© et constitue sans doute le «grand roman» qu'on pouvait attendre de ce conteur hors pair. YN