Musique / Patrick Watson est d'abord un jeune homme à la voix d'or (le genre vocalises en millefeuille éploré façon Jeff Buckley ou Thom Yorke), californien poussé dans le réfrigérateur Montréalais, là où, depuis quelques années, le rock se conserve mieux qu'ailleurs. Mais «Patrick Watson» est aussi un quatuor incluant le premier cité en un savant système de poupées russes. Souvenez-vous en cours de français de seconde, on appelait ça une mise en abyme. Sauf que Patrick Watson, le quatuor, porté par la voix de Patrick Watson, le gars, aurait plus tendance à flirter avec la voûte céleste qu'avec un obscur abîme où s'ébattraient les calamars hypertrophiés. Pour preuve, le titre peu hasardeux de ce deuxième album-révélation : Close to Paradise. «Proche du paradis» mais jamais en mesure d'y entrer, tant surnage l'impression de s'en éloigner à mesure qu'on s'en approche : il faut plusieurs écoutes pour s'abandonner à ses charmes, plus encore pour en faire le tour, mais on n'en revient pas. Pour se faire une idée, Watson & Watson sont une sorte d'excroissance folk de leurs idoles Erik Satie et Claude Debussy, voyageant dans le bus cinglé des Beatles du Magical Mystery Tour. Leur «méta pop», qui parvient à s'affranchir des limites souvent piégeuses de la citation postmoderniste, est donc bien plus intéressante que, au hasard, la dernière saillie éreintée du faux jeune McCartney ou les rodomontades émasculées d'un Mika. Car Watson a suffisamment de talent pour susciter les comparaisons les plus flatteuses et, dans le même mouvement, les faire oublier, appâter un public paresseux avec des mélodies façonnées à l'alambic, ou encore chanter le poids du monde (Weight of the World), certes, mais juché sur un planeur. SDPATRICK WATSONA la Marquise, le 9 novembre «Close to Paradise» (Secret CityV2)