Musique / On les imaginait moisissant dans leur triste ville de Dunkerque, au bord du suicide après les 53% de Sarkozy, énième défaite de ces losers autoproclamés de la musique (alors qu'ils composent, en France, parmi ce que l'on peut entendre de plus revigorant). Mais non, tels des phœnix renaissant avec les premières lueurs de l'été, Le Comte du Cul et Jonaz reviennent se produire dans cette bonne ville de Lyon qui jadis les accueillît à la hauteur de leur talent. Et on se réjouit de les voir, gonflés à bloc pour leurs trois soirs - pas un, pas deux : trois ! au Kraspek Myzik, déversant leur désespoir festif transformé en complaintes fédératrices. Le Comte du Cul, c'est l'homme qui chante le mieux la mort, le suicide, la maladie, la dèche, la bêtise télévisuelle, l'absence de Dieu et les hymnes post-carcéraux de Dominique Rossi (si vous ne comprenez pas la référence, il vous l'expliquera lui-même), celui qui réconcilie dans une même harmonie Brassens et les Beach Boys ; c'est depuis longtemps une de nos idoles. Quant à Jonaz, il renvoie le rap à son essence subversive en le débarrassant de toute technique superfétatoire, faisant de chacun de ses morceaux une pièce détachée d'une existence consacrée à l'échec. Et quand tous deux se retrouvent pour un morceau de bravoure intitulé La Lutte des classes expliquée aux riches, ils renvoient tous les tenants d'un hypocrite pragmatisme, de Michel Rocard à Ernest-Antoine Sellière, dans le même caniveau idéologique. Car notre temps, si vicié soit-il, donne chaque jour raison à ces troubadours modernes apôtres de la glande productive et du RMI comme arme artistique.CCLe Comte du Cul et JonazAu Kraspek MyzikLes 15, 16 et 17 juin