Le goût amer de la vengeance
Théâtre / Quand le directeur du TNP, Christian Schiaretti, s'attaque à Coriolan, son premier Shakespeare, il ne lésine pas sur les moyens. Le résultat, magistral, est à la hauteur de ses ambitions.Dorotée Aznar

Si l'on excepte le nombre de comédiens présents sur scène, Christian Schiaretti fait le choix de la sobriété. Un plateau dépouillé (la scène a été entièrement démontée pour faire place à un immense sol en béton), aucun décor, ni de volonté d'une quelconque reconstitution historique ou de péplum bon marché (comme le montre le choix de costumes du XVIIe siècle) ; l'espace est laissé tout entier au texte et aux interprètes. Et puisque l'on ne peut tous les citer, saluons Wladimir Yordanoff dans le rôle-titre, Nada Strancar dans celui de la mère de Coriolan ou Dimitri Rataud, chef des Volsques, qui incarnent magistralement leurs personnages. Sous les yeux d'un spectateur conquis, une relation d'amour et de domination complexe et émouvante se développe entre une mère et son fils et l'ennemi d'hier devient l'allié transit d'admiration qui ne manque pourtant pas de punir ; la mise en scène ne permet pas seulement d'entendre le texte, mais en développe avec une rare intensité les aspects les plus troubles. S'il est un grand texte classique résolument contemporain à voir cette saison, c'est assurément ce Coriolan de Schiaretti, si politique et si politiquement incorrect. Et même les légers problèmes acoustiques dus au dispositif scénique n'enlèvent rien à cette incontestable performance. Coriolan
Au Théâtre National Populaire de Villeurbanne