Expo / Angela Detanico et Rafael Lain (nés en 1974 et 1973 au Brésil) bidouillent les technologies autant qu'ils bricolent les matériaux les plus triviaux. Il présentent à la BF15 un petit ensemble d'œuvres au premier abord déroutant (minimaliste, presque dérisoire), mais qui s'avère cohérent, inventif et poétique. On découvre en premier lieu quatre piles de boîtes en carton devant la vitrine de la galerie. «C'est un exemple de Pilhia (pile en portugais), notre système d'écriture», explique Angela Detanico. Un objet correspond au A, deux objets empilés au B, trois au C, et ainsi de suite... On peut lire ainsi ici «Flow» d'un côté et «Wolf» de l'autre. Un système tout simple qui permet d'écrire à partir de n'importe quoi (sucres, briques...), de donner du sens au monde matériel et inversement un poids, une manifestation concrète aux mots. Plus loin, l'enregistrement du son d'une respiration est émis quatre fois selon des longueurs d'ondes différentes, produisant ainsi une impression de flux (Flow en anglais) et reflux de vagues. À l'étage, on découvre deux écrans : sur celui de gauche un bouquet de fleurs peint par un artiste hollandais du 17e siècle, sur celui de droite l'apparition progressive de pixels de couleur. Un logiciel informatique transfère un à un les différents tons de la peinture : les fleurs se fanent, disparaissent, pour laisser place à une figuration abstraite artificielle. Enfin, dans la vidéo The Waves, les artistes s'adonnent à un étonnant jeu de mots animés, difficilement descriptible ici, à partir du roman éponyme de Virginia Woolf. Le flux, les vagues, le passage du temps, Woolf, le courant de conscience, la poésie concrète brésilienne : tout prend peu à peu du sens, crée insensiblement une atmosphère poétique. Une transformation des choses en mots, des images en d'autres représentations, qui s'apparente au processus chimique de la respiration, décomposition et recomposition du monde. Jean-Emmanuel DenaveFlowWolfAngela Detanico et Rafael Lain Jusqu'au 30 décembre à la BF15.