Le crétin magnifique
Dans une flopée d'œuvres a priori crassement anodines, le génial humoriste Will Ferrell démonte l'exaltation du rêve américain. Retour sur ce savoureux processus de déconstruction à l'occasion de la sortie de Semi-pro. François Cau

Cette structure narrative s'assortit systématiquement d'une description déférente mais passablement ironique du milieu abordé, les personnages interprétés par Will Ferrell se chargeant de condenser avec verve tous les écarts inhérents à ces univers régis par le fric, l'apparence, la perte progressive de leurs primes valeurs éthiques. Après, inutile de se mentir, ces films restent de franches pantalonnades, où le non sens le plus total déstructure les caricatures de l'homo americanus dans toute sa démesure. Si Présentateur vedette... est certainement l'opus le plus jouissif du lot, Ricky Bobby... demeure quant à lui le plus virulent, satire jusqu'au-boutiste des microcosmes familiaux, sportifs, médiatiques et commerciaux. Quand Will Ferrell et une partie de ses collaborateurs fidèles ont annoncé leur intention de s'atteler à l'adaptation du magnifique roman La Conjuration des Imbéciles de John Kennedy Toole, le projet en fit saliver plus d'un, tant Ignatius J. Reilly, le héros du livre, pouvait être considéré comme un lointain cousin de Ron Burgundy, Ricky Bobby ou Chaz Michael Michaels. Las, la production ne fut jamais réellement lancée. Le 14 mai sortait au Pathé Échirolles Semi-Pro, dernière exploitation du filon Will Ferrell, sis dans le milieu du basket. Si on ne peut que se réjouir qu'il arrive jusqu'à nos humbles écrans provinciaux (à l'inverse de ses prédécesseurs), on peut cependant regretter que le film accuse de sévères baisses de qualité et de rythme, et que sa version française soit aussi bâclée. Les vrais et beaux losers ont décidément la vie dure...