JCVD

Jeudi 5 juin 2008

Véritable plaidoyer en faveur de sa star, le film de Mabrouk El Mechri réhabilite son icône brisée avec une tendresse touchante, mais reste, en dépit des apparences, une série B relativement calibrée.François Cau

Le second long métrage de Mabrouk El Mechri est construit en cercles concentriques, dont le pivot serait bien évidemment son acteur principal. Un premier niveau nous le présente en représentation sublimée de lui-même, tant sur les plateaux de tournage que dans son combat pour la garde de sa fille. Le second introduit le contexte du drame, le troisième amène une narration construite en flashbacks, le quatrième nous fait basculer dans le polar 70's, dont le contexte social est substitué à une série de temps mort où l'action star proche de la cinquantaine fait le bilan contrasté de son existence.
Il faut reconnaître à Mabrouk El Mechri les énormes progrès accomplis depuis son premier coup d'essai, Virgil, proposition de cinéma déjà généreuse, mais débordant d'un trop plein d'énergie et d'effets stylistiques qui nuisait à sa lisibilité. Si quelques tics de mise en scène demeurent, ses partis pris savent ici se mettre véritablement au service de l'histoire (via la construction en plans-séquences, notamment). Certains dialogues demeurent un rien trop écrits, voire pesants dans leurs clins d'œil appuyés à une cinéphilie populaire. Et si l'on prend un plaisir certain face à ce polar jazzy, sépia et caustique, son intrigue et sa résolution, convenues et pour tout dire cousues de fil blanc, atténuent l'enthousiasme.Double impact
L'intérêt majeur du film est, comme prévu, son héros. Non seulement pace qu'on découvre ici un acteur si ce n'est remarquable, du moins tout à fait convaincant (bien que ses performances dans L'empreinte de la mort et In Hell étaient déjà plus qu'honorables), mais surtout parce que Mabrouk El Mechri lui offre ici un écrin cinématographique tout en déférence et en délicatesse. JCVD est une déclaration d'amour on ne peut plus touchante à un autodidacte vénéré par toute une génération, qui lui aura aussitôt tourné le dos lorsque le temps vint de moquer ses tergiversations lexicales maladroites.
Le film ne devient pas pour autant un procès à charge contre ces lazzis, ni leur reniement : dans son tétanisant monologue central, Jean-Claude Van Damme se dévoile avec son apparente absence de pudeur, qu'il accorde à ceux qui ont gagné sa confiance (pour généralement mieux l'écraser par la suite). Une performance impressionnante, qui nous confirme que quoi qu'on en pense, Van Damme est toujours resté fidèle à lui-même, a toujours cherché à faire les meilleurs films possibles pour son public tout en restant lucide sur sa condition. C'est en cela que JCVD est véritablement le film de sa vie : une œuvre mineure et légèrement bancale, mais d'une sincérité désarmante. JCVDDe Mabrouk El Mechri (Fr, 1h36) avec Jean-Claude Van Damme, Karim Belkhadra...