«En 1945, on dérange !»

par JED
Mardi 18 novembre 2008

Francine Christophe a publié plusieurs témoignages chez L'Harmattan : Après les camps, la vie ; Une petite fille privilégiée...Propos recueillis par JED

Parmi les exemples individuels cités dans l'exposition, un ensemble de documents est consacré à Robert Christophe, officier capturé en juin 1940 envoyé d'abord à Laval puis à l'Oflag 18A en 1940 et à l'Oflag 17A en mai 1941. La situation de cet officier et de sa famille est d'autant plus complexe qu'ils sont de confession juive. En 1942, son épouse et sa fille Francine sont arrêtées en France, échappent aux camps d'extermination grâce au statut de prisonnier de guerre du chef de famille, sont envoyées successivement dans plusieurs camps français (Drancy, Pithiviers...) et, en mai 1944, dans le camp de concentration de Bergen-Belsen. En juin 1945, toute la famille se retrouve enfin... Francine Christophe témoigne :
«Mon père a été «cueilli» en 1940 et envoyé ensuite en Allemagne dans des wagons à bestiaux sans paille, ouverts seulement une fois par jour. Les officiers étaient à ce moment-là obligés d'uriner devant témoins, humiliés de cette manière par les Allemands. D'Allemagne, mon père pouvait nous envoyer deux lettres et deux cartes postales par mois : toutes étaient lues par la censure, certaines caviardées, ma mère et mon père utilisaient des codes afin de contourner la censure... Les prisonniers recevaient la presse allemande et la presse collaborationniste de Vichy. Ils étaient normalement, ainsi que leur famille, protégés par les Conventions de Genève, mais celles-ci n'étaient pas toujours respectées : par exemple des évadés ont été exécutés. En 1945, le retour des prisonniers de guerre et des déportés a eu lieu dans la plus grande panique. L'Allemagne était en déroute, les ponts et les routes étaient détruits. De plus, en France on n'était pas prêts à nous recevoir. À partir de la Libération de 1944 les gens dansent ; en 1945 les prisonniers et les déportés reviennent : on dérange !»