Noir c'est noir
Musique / Pour passer à l'Épicerie Moderne ces temps-ci, il fait bon s'appeler Joe. Après la révélation tardive de l'indien «Joe le lent», récemment passé par Feyzin, voici «Joe le noir», Black Joe Lewis le Texan. Lequel partage avec son aîné de Goa le goût des vieilles recettes au goût de rock des origines. Si le rock est une affaire d'image, d'Épinal ou du Mississippi, le dénommé Black Joe Lewis cadre parfaitement avec celle qu'on se fait du bluesman/soulman de tradition et d'estampille sudiste. C'est sûr, avec Black Joe Lewis on est loin du r'n'b bien urbain, squatteur de charts et essoreur de divas portées sur la bouteille. Plutôt dans une sorte d'énumération très revivaliste, mais soucieuse d'authenticité, de black music idéale, comme on dit discothèque idéale : de Lightnin' Hopkins à Sam & Dave, de Howlin' Wolf à Little Richard, de Chuck Berry à James Brown. Autrement dit tout ce que la musique noire compte de «shouters» agités de la culotte. Avec ses Honeybears, ses ours à miel, plantureux orchestre à la peau cuivrée, le programme est autant fait de rage crue texane que de miel. Et comme l'indique le titre de l'album, «Tell'em What Your Name is», cette musique sans fard dit clairement son nom : textes imagés pour ne pas dire salaces (Bitch, I Love You) dans la grande tradition des histoires Eros (Big Booty Woman) et Thanatos (Master Sold my Baby) des bluesmen, voix malmenée jusqu'à extinction du feu sacré, surenchère rythmique et instrumentale, à un doigt - le plus grand - du punk garage, tout y est pour raviver le souvenir des grands anciens. Et on s'y croirait.
Black Joe Lewis & The HoneybearsÀ l'Epicerie Moderne, dimanche 11 avril.