Nuit de folie

Vendredi 30 avril 2010

Photo : Gérard Bezard / La République du Centre

OPÉRA / Tragédie en huis clos traitant du poids des conventions, Mademoiselle Julie est l'une des pièces phares de Strindberg. Pièce que le compositeur belge Philippe Boesmans a adaptée pour l'opéra en 2005, avec un livret de Luc Bondy. En gardant la trame vaudevillesque de l'intrigue (un couple de domestiques voit débouler leur jeune maîtresse bien décidée à s'amuser en cette soirée de Saint-Jean) et la lente progression vers le drame. Tout ça en 1h15 (très court pour un opéra). Le metteur en scène Matthew Jocelyn s'est ainsi attaqué à cet opéra de chambre pour un résultat d'une grande tenue. Il décide de faire de Julie une jeune femme qui s'abandonnera pleinement au cours de la nuit, dans un dangereux jeu sadomaso avec son domestique. Véritable vampe fragile, elle finit par ne plus rien contrôler... La mise en scène, on ne peut plus théâtrale, se joue de ces contrastes : Julie, vêtue d'une robe rouge criant, dévoile ses atouts dans des poses lascives, devant un Jean (le domestique) testostéroné à bloc, et une Kristin (la femme de Jean) en retrait, se devant de respecter son rang face aux ambitions de son partenaire. On est donc loin ici des envolées lyriques inhérentes aux grands opéras tragiques : le rendu est froid, dans un décor opulent et bringuebalant (la cuisine d'un château dans la Suède de la fin du XVIIIe) enfermant les personnages dans leurs conventions. C'est surprenant, mais on se laisse facilement prendre au jeu, notamment grâce aux trois interprètes qui portent l'ensemble avec conviction (avec notamment une Kristin musicalement très juste, toute en retenue - les deux autres offrant une palette moins nuancée). Une proposition qui donne envie de se mettre à l'opéra : amis programmateurs grenoblois, here we go !
AMJULIE
Mardi 11 mai à 20h, à la Rampe (Échirolles)Lisez l'interview