Trilogie Mozart/Da Ponte Ou... les fragments d'un discours amoureux
Festival / À l'Opéra de Lyon, le Festival Mozart va réjouir les amoureux de l'amour. «Les Noces de Figaro», «Cosi fan tutte» et «Don Giovanni» : trois chefs d'œuvre d'une puissance émotionnelle rare, mis en scène et en perspective par un Adrian Noble tout en subtilité.Pascale Clavel

Composé en 1790, un an avant la mort du compositeur, «Cosi fan tutte» («Ainsi font-elles toutes»), a choqué par son immoralité. Cette «école des amants» est pourtant l'opéra le plus divertissant de Mozart dans lequel le jeu, le vrai et le faux sont au centre de l'intrigue. Les personnages jouent à être ailleurs, autre chose que ce qu'ils sont. Deux couples d'amoureux (Fiordiligi et Guglielmo, Dorabella et Ferrando) et un couple de manipulateurs (Don Alfonso et Despina) pour une histoire qui peut paraître simple, voire légère. Mozart et Da Ponte nous donnent une leçon de vie et redisent à l'envi que l'amour est un apprentissage de chaque instant. Le metteur en scène Adrian Noble en propose une lecture toute en subtilité, d'une grande fidélité au livret jusqu'au dénouement. Là , il se permet une petite audace : un seul couple se reforme, l'autre ne s'y aventure pas. Vous, le charme...
«Les Noces de Figaro», composé en 1786, est le premier des trois opéras que Mozart écrit avec Da Ponte. Le Comte Almaviva préfère les jeunes filles à sa femme. Elle n'est pas dupe et demande à ses domestiques de punir son époux. Badinages, ruses, quiproquos, au bout d'une folle journée, le Comte - sorte de Don Juan assez sympathique - se repend et tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. La Comtesse, Suzanne, Barberine : portraits de femmes qui tiennent leur revanche. «Les Noces» font date dans l'histoire de la musique ; Mozart y donne une véritable place à l'orchestre, privilégiant les duos, trios et autres quatuors vocaux aux arias de solistes. Le public, au XVIIIe siècle, ne peut plus seulement se divertir des prouesses vocales de tel ou tel chanteur. Avec «Les Noces», Mozart invente en quelque sorte l'opéra-bouffa sérieux.«Pentiti ! - No !»
Don Giovanni (1787), ce drôle de drame, semble être le plus connu des trois. Tout s'y passe à une rapidité déconcertante : une tentative de viol, un duel, un mort et l'aventure qui continue. Drame en fait plus subtil qu'il n'y paraît où le commandeur invisible reste le personnage principal. Il nous est paradoxalement presque sympathique ce Don Juan qui jusqu'au bout ne veut pas admettre son erreur : «Pentiti ! - No !» ; il ne se repent pas, même devant la mort... En répétition, le jeune et baroqueux chef d'orchestre Stefano Montanari ne se montre ni avare de nuances ni de contrastes. De sa gestique, hypnotique, esthétique, sort une musique venue d'un XVIIIe siècle plein d'esprit où l'ornement n'est pas un vulgaire objet décoratif mais claque comme une gifle revigorante. Côté chanteurs, certains devront faire un grand écart de jeu et quelques prouesses vocales. Ainsi Lionel Lhote enfile le costume de Don Alfonson dans «Cosi» et celui de Leporello dans «Don Giovanni». Mais c'est Elena Galitskaya qui remporte le numéro d'équilibriste le plus périlleux puisqu'elle est Despina dans «Cosi», Barberine dans «Les Noces» et Zerline dans «Don Giovanni». Festival Mozart
À l'Opéra de Lyon
Du lundi 14 mars au mercredi 6 avril.