J'ai rencontré le diable
Confirmant son statut de suiveur dans le cinéma sud-coréen, Kim Jee-woon tente d'épuiser le genre du film de vengeance par une surenchère de sadisme et de virtuosité.Christophe Chabert

Dans un premier temps, l'élégance qu'imprime Kim Jee-woon a ses séquences fait illusion. Et lorsque le principe du récit est lancé (un garde du corps se venge du meurtre de sa fiancée en traquant l'assassin, non pour le tuer, mais pour lui faire subir des sévices graduellement atroces), J'ai rencontré le diable possède sa petite originalité. Mais assez vite, le film ne tient plus que par ses morceaux de bravoure, sa virtuosité et, plus problématique, la surenchère de violence qu'il impose au spectateur. Sur ce point, il ne faut pas longtemps pour constater que Kim Jee-woon n'a guère de point de vue moral sur ce qu'il montre : confondant jouissance de la mise en scène et plaisir pervers à déverser des hectolitres de sang sur l'écran, il s'installe dans un scénario qui applique son programme sans jamais chercher à y apposer une vision du monde sinon celle, éculée, d'une société absurde fondée sur une justice arbitraire. On se sent alors constamment tiraillé entre deux sentiments : le désir de se laisser emporter par un spectacle orchestré de main de maître (il y a au moins trois grands moments dans le film : le meurtre dans la voiture, l'irruption chez les complices du serial killer et la reddition du tueur qui se transforme en chaos urbain) et l'envie de renvoyer le cinéaste à son ambition, à savoir tuer un genre qui ne lui a rien demandé. Cette prétention de lui donner son œuvre définitive avant d'aller s'attaquer avec opportunisme à un nouveau territoire cinématographique est définitivement la marque d'un suiveur, pas d'un auteur.J'ai rencontré le diable
De Kim Jee-woon (Corée du Sud, 2h22) avec Lee Byung-hun, Choi Min-sik...Sortie le 13 juillet