Tout ça pour ça

Jeudi 28 mars 2013

Photo : Ruth Walz

Si le nombre incalculable de propositions culturelles adressées au public oblige à un zapping effréné, on peut parfois prendre le temps de la réflexion et oser un lapidaire : pourquoi ? Oui, pourquoi Luc Bondy, metteur en scène de renom, a-t-il choisi de monter cette pièce de Pinter (Le Retour, publiée en 1964) avec ce casting-là (une pléiade de stars qui n'a pas été sans conséquence sur le budget de la création) ?

Sur le texte de Pinter, et la nouvelle traduction de Philippe Djian, c'est l'incompréhension : une œuvre fade et poussive, malgré un sujet sulfureux (une femme fait irruption dans une famille uniquement composée d'hommes, et choisit volontairement de rester avec eux pour se prostituer) qui questionne quant à sa pertinence aujourd'hui - « un ramassis de clichés misanthropes et misogynes » écrira même la romancière Nancy Huston dans une tribune publiée par Libération.

Quant au casting vertigineux (Bruno Ganz, Louis Garrel, Emmanuelle Seigner, Pascal Greggory...), il laisse pantois, aucune de ces figures du théâtre et du cinéma ne crevant plus la scène qu'un quidam inconnu - ce qui permet aux deux comédiens moins bankable (Jérôme Kircher et, surtout, l'excellent Micha Lescot) de briller. En résulte plus de deux heures de théâtre qui, à une autre époque, auraient peut-être paru modernes ou sulfureuses ; mais qui, le temps jouant, semblent dramatiquement tourner à vide.

Aurélien Martinez

Le Retour, du jeudi 4 au mercredi 10 avril, à la MC2

Le Retour

Texte de Harold Pinter, ms Luc Bondy, avec Bruno Ganz, Emmanuelle Seigner, Pascal Greggory, Louis Garrel, Jérôme Kircher et Micha LescotUn universitaire expatrié aux États-Unis vient présenter à son père et à ses frères la jeune femme qu'il y a épousée. Celle-ci, prise dans le dense réseau des désirs croisés de ce groupe de mâles, finira par se prostituer à eux sans qu'on puisse précisément déceler si ce sont eux qui l'exploitent, ou si c'est elle qui va se servir d'eux. L'oeuvre s'ouvre sur un homme qui lit un journal en silence, dans un banal séjour avec chaises, fauteuils et canapé.