Les mamans et les putains : "Filles de joie"

Mercredi 24 juin 2020 / Lyon

Drame / Axelle, Dominique et Conso, trois voisines du Nord de la France, franchissent la frontière belge chaque jour pour proposer leurs faveurs en maison close afin d'améliorer un ordinaire misérable. Les rêves en berne, l'usure morale le dispute à la déchéance physique et au mépris des proches...

Photo : © Versus Production / Les Films du Poisson

Comme chez Brassens, « c'est pas tous les jours qu'elles rigolent/Parole, parole », les trois "filles" du titre. La joie reste sous cloche dans ce film à la construction aussi subtile que décalée, rendant bien compte de la situation bancale de chacune au sein du groupe, autant que de leur individualité. Nous ne sommes pas ici dans l'habituel configuration des filières de l'Est ou du Sud et des portraits de filles réduites en esclavage par des réseaux mafieux, puisque ces travailleuses du sexe n'ont pas de souteneur. En apparence, seulement : l'argent qu'elles gagnent si péniblement ne leur profite pas, servant à nourrir la mère azimutée et les gosses de l'une, financer les extras des enfants ingrats de l'autre, alimenter les rêves chimériques d'extraction sociale de la troisième...

La prostitution est rarement un choix, et le trio composé par Frédéric Fonteyne & Anne Paulicevich ne s'y adonne pas par plaisir. Ce qu'il révèle surtout d'un point de vue sociologique, c'est que le recours au commerce de son corps, jadis réservé aux plus pauvres des plus pauvres, à ce quart-monde hugolien peuplé de courtisanes phtisiques et de demi-mondaines vieillissantes, touche à présent les classes moyennes, où il est d'une tragique banalité.

En soignante des corps, Noémie Lvovsky livre une interprétation à mille lieues de son rôle de nonne chez Martin Provost mais qui sonne aussi juste. Quant à Sara Forestier, bouillonnant de vie et d'exaltation, elle habite comme à l'accoutumée son personnage avec une douleur presque communicative.

Filles de joie
Un film de Frédéric Fonteyne & Anne Paulicevich (Fr-Bel, int.-12 ans avec avert., 1h21) avec Sara Forestier, Noémie Lvovsky, Annabelle Lengronne...

Filles de joie

sortie nationale : Mercredi 29 janvier 2020
De Frédéric Fonteyne, Anne Paulicevich (Bel-Fr, 1h31) avec Noémie Lvovsky, Sara Forestier, Annabelle Lengronne

Axelle, Dominique et Conso partagent un secret. Elles mènent une double vie. Elles se retrouvent tous les matins sur le parking de la cité pour prendre la route et aller travailler de l’autre côté de la frontière. Là, elles deviennent Athéna, Circé et Héra dans une maison close. Filles de joie, héroïnes du quotidien, chacune se bat pour sa famille, pour garder sa dignité. Mais quand la vie de l’une est en danger, elles s’unissent pour faire face à l’adversité.