L'acquisition d'un terrain dans un lotissement pour la construction d'une maison individuelle

par Me Marion Batisse, notaire
Mercredi 28 août 2024

Lors de l'acquisition d'un lot de terrain pour la construction d'une maison individuelle dans un lotissement, à quel moment et à quelle condition déposer une demande de permis de construire ? Pour répondre à cette question, il convient d'abord de définir le lotissement.

Qu'est-ce qu'un lotissement ?

Définition

Toute division d'un tènement immobilier pour créer un terrain à bâtir constitue un lotissement. Lorsque la division d'un terrain est constitutive d'un lotissement, elle doit être précédée, soit d'un permis d'aménager, soit d'une déclaration préalable.

Doivent être précédés de la délivrance d'un permis d'aménager, les lotissements :

  • qui prévoient la création ou l'aménagement de voies, d'espaces ou d'équipements communs à plusieurs lots destinés à être bâtis et propres au lotissement. Les équipements pris en compte sont les équipements dont la réalisation est à la charge du lotisseur ;
  • ou qui sont situés dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable, dans les abords des monuments historiques, dans un site classé ou en instance de classement.

Doivent être précédés d'une déclaration préalable, les lotissements autres que ceux ci-dessus visés. Le lotissement soumis à permis d'aménager connaît un régime juridique beaucoup plus contraignant que le lotissement soumis à déclaration préalable. On s'attachera donc aujourd'hui essentiellement au lotissement soumis à permis d'aménager.

Obtention du permis d'aménager par le lotisseur

En principe, le délai d'instruction est de trois mois pour la délivrance d'un permis d'aménager, auquel s'ajoute éventuellement un mois, si des pièces complémentaires sont demandées par la mairie. Une fois le permis d'aménager obtenu, s'ajoutent trois mois supplémentaires pour la purge du recours des tiers et du retrait de l'administration.

Le permis d'aménager délivré par la commune sera assorti de la prescription de travaux à la charge du lotisseur pour la création ou l'aménagement de voies, d'espaces ou d'équipements communs. En effet, très souvent, le lotisseur va devoir créer une voie d'accès commune aux divers lots du lotissement (voies de circulation, trottoirs, bordures, espaces verts et autres espaces communs), ainsi qu'un réseau de viabilisation commun jusqu'en limite de propriété (eau, électricité, gaz, téléphone...). Il appartiendra ensuite à l'acquéreur de raccorder la construction qui sera édifiée à ces réseaux.

Le lotisseur va donc déposer une déclaration d'ouverture de chantier pour la réalisation de ces travaux, puis une déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux à l'issue des travaux. La mairie disposera alors d'un délai de trois mois pour éventuellement s'opposer à la conformité des travaux.

Pour la commercialisation de ses lots de terrain, le lotisseur devra respecter un calendrier strict et encadré défini par le législateur. Ainsi avant la délivrance d'un permis d'aménager, aucune promesse de vente ne pourra être consentie par le lotisseur et aucun acompte ne devra lui être versé.

La vente d'un lot pour la construction d'une maison individuelle

La régularisation d'une promesse unilatérale de vente après l'obtention du permis d'aménager

Après l'obtention de son arrêté de permis d'aménager, le lotisseur pourra régulariser avec les divers acquéreurs une promesse unilatérale de vente, indiquant la consistance du lot réservé, sa délimitation, son prix et son délai de livraison, avec versement par l'acquéreur d'une indemnité d'immobilisation dont le montant ne pourra pas excéder 5 % du prix de vente et qui sera restituée à l'acquéreur en cas de non réalisation d'une condition suspensive.

La promesse unilatérale de vente sera en effet conclue sous diverses conditions suspensives :

  • Classiquement et si nécessaire, une condition suspensive d'obtention d'un financement bancaire.
  • Et une condition suspensive de réalisation par le lotisseur des travaux prescrits par le permis d'aménager.

Quelle est l'opportunité de prévoir une condition suspensive d'obtention d'un permis de construire au bénéfice de l'acquéreur ?

Très souvent le lotisseur va arguer de la cristallisation pendant cinq ans des règles d'urbanisme dans un lotissement pour solliciter ou imposer aux acquéreurs l'absence de condition suspensive d'obtention d'un permis de construire dans l'objectif d'accélérer son processus de vente.

L'autorisation de lotir ne vaut pas permis de construire. Le lotissement est avant tout une autorisation de diviser le sol qui ne préjuge pas de la délivrance des permis de construire sur les lots issus du détachement. Un permis de construire est, en principe, délivré sur la base des règles d'urbanisme en vigueur au moment où la décision est prise. Mais si, entre la date de délivrance du permis d'aménager et celle à laquelle l'administration statue sur la demande de permis de construire, surviennent des changements dans la réglementation supprimant le droit de construire dans le lotissement, le permis de construire ne pourra pas être refusé sur le fondement des règles intervenues après la délivrance du permis d'aménager.

On soulignera toutefois que la garantie de l'obtention du permis de construire reste relative dans la mesure où elle ne concerne que les dispositions d'urbanisme, soit les règles contenues dans le plan local d'urbanisme. Elle ne concerne ni les servitudes d'utilité publique, telles que le passage en zone inondable du terrain dans un plan de prévention des risques naturels, ni les modifications des règles propres au lotissement, telles qu'une modification du cahier des charges par les colotis eux-mêmes, limitant au sein du lotissement une règle de construction (densité, hauteur...).

La régularisation de la vente après la réalisation des travaux par le lotisseur

La vente d'un lot de lotissement autorisée suivant un permis d'aménager ne peut pas intervenir avant l'exécution des travaux imposés au lotisseur par le permis d'aménager, autrement dit, le lotisseur devra avoir avancé les fonds correspondant au coût des travaux et déposé en mairie la déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux pour vendre.

Toutefois, si le permis d'aménager le prévoit, le lotisseur peut être autorisé à vendre les lots avant le début des travaux qu'il doit réaliser. De même, pour éviter la dégradation des travaux de finition (revêtements des voies, trottoirs, bordures, plantations, etc.) lors de la construction des immeubles, il peut solliciter l'autorisation de vendre les lots par anticipation auprès de la mairie. Dans ces cas, le lotisseur doit produire une garantie financière d'achèvement et indiquer la date limite de réalisation.

La dernière étape : l'obtention du permis de construire par l'acquéreur

Pour les constructions de maison individuelles, le permis de construire des bâtiments sur les lots d'un lotissement autorisé par un permis d'aménager peut être accordé :

  • Soit à compter de l'achèvement des travaux d'aménagement du lotissement ;
  • Soit à compter de la délivrance de l'autorisation de procéder à la vente ou à la location des lots avant exécution des travaux, à condition que les équipements desservant le lot soient achevés. Dans ce cas, le lotisseur fournit à l'acquéreur un certificat attestant, sous sa responsabilité, l'achèvement de ces équipements. Ce certificat est joint à la demande de permis.

Le délai d'instruction de la mairie sera en principe de deux mois, prorogé éventuellement d'un mois en cas de demande de pièces complémentaires. Une fois le permis de construire obtenu, comme toute autorisation administrative, ce dernier sera soumis à un délai de trois mois supplémentaires pour la purge du recours des tiers et du retrait de l'administration.

Même si l'absence ou la levée des recours sur le permis d'aménager présuppose l'absence de recours sur les permis de construire des divers acquéreurs, la purge de ces délais incompressibles avant le démarrage des travaux de construction des maisons est indispensable à la sécurité juridique des constructions.