Le contentieux de la protection sociale : un contentieux complexe et technique
Le contentieux de la protection sociale regroupe tous les litiges opposant un assuré aux organismes sociaux (CPAM, CAF, CDAPH, Urssaf, Carsat...). Toute décision prise par l'un de ces organismes peut, lorsqu'elle est défavorable, être contestée.
Si le principe semble clair, la législation applicable en la matière s'avère particulièrement technique et complexe, de sorte que nombre d'assurés n'engagent aucune contestation même lorsqu'ils sont en désaccord avec la décision rendue. En outre, dans le cadre d'un contentieux, l'assuré a comme contradicteur un organisme qui maîtrise les subtilités de ces textes, ce qui peut également constituer un frein à l'engagement d'un recours. Le recours à un avocat permet donc à l'assuré de faire valoir correctement ses droits.
L'obligation du recours gracieux préalable
Le contentieux de la protection sociale recouvre le contentieux non médical et le contentieux médical.
Toute contestation d'une décision défavorable d'un organisme social doit désormais faire l'objet d'un recours gracieux préalable : devant la commission de recours amiable (CRA) de l'organisme concerné pour les questions non médicales (affiliation, droit ou montant des prestations, indu de prestations...), devant la commission médicale de recours amiable (CMRA) pour les litiges d'ordre médical (invalidité, taux d'incapacité permanente, carte mobilité inclusion, allocation pour l'éducation de l'enfant handicapé, allocation adulte handicapé...), ou devant l'autorité compétente (articles L134-1 et L134-2 du Code de l'action sociale et des familles).
Le délai pour contester est de deux mois à compter de la notification de la décision concernée.
Il faut préciser que ce délai ne court que pour autant qu'il ait été expressément mentionné dans la décision. À défaut, l'organisme ne pourra reprocher à l'assuré d'avoir agi hors délais.
Le recours doit être adressé par lettre recommandée avec accusé de réception, comporter les arguments et pièces éventuelles motivant la contestation ainsi que la copie de la décision contestée.
La CRA ou la CMRA accusent, en principe, réception du recours gracieux, ce qui fait courir le délai dans lequel elles doivent statuer, à savoir : deux mois pour la CRA et quatre mois pour la CMRA.
Si aucun accusé de réception n'est adressé par la Commission, il est conseillé de prendre en compte la date de réception du recours figurant sur l'accusé de réception de la Poste comme point de départ du délai.
Il faut préciser, concernant le contentieux médical, que la CMRA peut, d'office ou à la demande de l'assuré, procéder à un examen médical de ce dernier au cours de l'instruction du recours.
À l'issue du délai imparti :
- Soit la commission a rendu une décision au sujet du recours gracieux et sa décision se substitue alors à la décision initiale ayant fait l'objet de la contestation, étant précisé que cette décision doit mentionner le délai de recours et le tribunal compétent.
- Soit la commission n'a pas rendu de décision, et dans ce cas, le recours est considéré comme rejeté.
L'assuré dispose alors d'un délai de deux mois pour saisir le tribunal compétent contre la décision explicite ou implicite de rejet de son recours gracieux.
La possibilité de recourir à la médiation
Avant d'agir en justice, l'assuré peut saisir le médiateur de l'organisme social concerné. Le processus de médiation est facultatif et a été créé afin de prévenir et de traiter les contestations. La saisine du médiateur suspend le délai de recours contentieux dès que celui-ci confirme la recevabilité de la demande. Aux termes de l'examen de celle-ci, il émet des recommandations non contraignantes pour l'organisme social. Le délai de recours contentieux recommence à courir dès que les recommandations du médiateur ont été portées à la connaissance des parties.
La phase contentieuse
Depuis le 1er janvier 2020, le contentieux de la protection sociale est réparti entre le pôle social du tribunal judiciaire et le tribunal administratif. Le recours à un avocat n'est pas obligatoire.
Devant le pôle social du tribunal judiciaire, la procédure est orale, ce qui signifie que les arguments n'ont pas nécessairement à être écrits. En revanche, il est nécessaire de respecter le principe du contradictoire, qui impose de transmettre à la partie adverse, suffisamment avant l'audience, les éléments dont il sera fait état lors de celle-ci. Pour le contentieux médical, le pôle social du tribunal judiciaire peut, soit d'office, soit à la demande de l'une des parties, ordonner une consultation clinique ou sur pièces à l'audience. Le jugement rendu par le pôle social peut, sauf exceptions prévues par les textes, faire l'objet d'un appel devant une chambre spécialisée de la cour d'appel : les mêmes règles de procédure s'appliquent.
Devant le tribunal administratif, la procédure est écrite : les parties doivent donc échanger leurs arguments écrits et pièces avant l'audience.
Focus sur les délais de recours
L'ensemble des délais pour agir en matière de contentieux de la protection sociale est prescrit à peine de forclusion, ce qui signifie que si les délais sont expirés, la décision de l'organisme devient irrévocable. Le dépôt d'un dossier d'aide juridictionnelle dans le délai de recours suspend ce délai. Un nouveau délai court à compter du caractère définitif de la décision d'aide juridictionnelle, que cette décision soit une décision de refus d'aide juridictionnelle ou une décision d'octroi d'aide juridictionnelle partielle ou totale.
L'utilité de faire appel à un avocat
Les décisions rendues par les organismes sociaux peuvent parfois paraître difficilement compréhensibles pour un non-initié. Consulter un avocat dès la réception de la décision défavorable permet d'avoir un avis éclairé sur l'opportunité ou non de la contester.
L'avocat va notamment vérifier le respect par l'organisme de la procédure pour parvenir à la décision défavorable, le respect des règles de forme et le bien-fondé ou non de la décision rendue. En effet, les textes applicables, et notamment le Code de la sécurité sociale, contiennent nombre de prescriptions que les organismes sociaux doivent respecter lorsqu'ils prennent une décision défavorable envers leurs assurés.
En particulier, les décisions doivent être motivées, c'est-à -dire qu'elles doivent faire mention des règles de droit et des faits retenus pour les prendre. Il s'agit de permettre à son destinataire d'en comprendre les raisons.
À titre d'exemple, lorsqu'un organisme social estime qu'un assuré a perçu à tort des prestations, il est en droit de lui notifier un indu et de solliciter le remboursement de la somme.
L'obligation de motivation impose ici à l'organisme social d'expliciter les prestations dont elle demande le remboursement, les périodes de versement concernées et les raisons pour lesquelles elle estime que ces prestations ont été versées à tort.
Sans ces éléments, l'assuré n'est pas mis en mesure de se convaincre du bien ou du mal fondé de la demande de l'organisme social et cette situation est contraire aux textes en vigueur.
Après étude de la décision de l'organisme, l'avocat sera en mesure de conseiller l'assuré quant à l'opportunité d'engager ou non un recours gracieux dans un premier temps, voire contentieux dans un second temps, si le recours gracieux n'aboutit pas favorablement.
Outre l'argumentation et la réunion des pièces nécessaires au soutien des demandes, l'avocat représentera ou assistera son client lors de l'audience. Pour le contentieux médical, l'avocat n'assistera pas à la consultation clinique mais sera présent lors de la restitution par le médecin consultant de ses conclusions.
Face à la complexité des voies de recours, aux délais et dispositions applicables, prendre l'attache d'un conseil compétent est donc vivement recommandé pour l'assuré souhaitant contester une décision défavorable d'un organisme social, afin d'augmenter ses chances de prospérer
dans son action.