Y a-t-il encore un intérêt à adhérer à un organisme de gestion ?

par Florent Rapin, Guillemette Rey Lescure
Lundi 10 mars 2025

Depuis quelques années, les avantages fiscaux accordés aux entrepreneurs individuels qui adhèrent à un organisme de gestion fondent comme neige au soleil. Une succession de réformes oblige les centres et les associations de gestion à se réinventer.

Depuis quarante ans, les organismes de gestion agréés (OGA), dont la plupart d'entre eux ont été créés par des experts-comptables, assistent les entreprises dans leur gestion et la prévention de leurs difficultés économiques et financières. Les OGA vérifient la concordance des déclarations des entreprises. Ils fournissent également une assistance technique, de la formation et des informations sur le droit, la fiscalité, la comptabilité et la gestion.

De la suppression de la majoration de 25 % instaurée par la loi de finances pour 2021...

Les entreprises soumises à l'impôt sur le revenu, titulaires de bénéfices industriels et commerciaux (BIC), de bénéfices non commerciaux (BNC) et de bénéfices agricoles (BA) et relevant d'un régime réel d'imposition (réel simplifié ou réel normal pour les BIC/BA, déclaration contrôlée pour les BNC) avaient intérêt à adhérer à un OGA afin d'éviter une majoration de 25 % de leurs revenus imposables.

La loi de finances pour 2021 a supprimé ce dispositif, instaurant une transition entre 2020 et 2022. Le taux de majoration passait à 20 % en 2020, à 15 % en 2021, puis 10 % en 2022 pour aboutir à une suppression définitive en 2023.

Depuis 2023, l'adhésion à un OGA n'a donc plus aucun intérêt en termes d'impôt sur le revenu.

... à la suppression de la réduction d'impôt pour frais de comptabilité, actée dans la loi de finances 2025

Jugée trop coûteuse pour l'État, la réduction d'impôt pour frais de comptabilité (article 199 quater B du Code général des impôts) a été supprimée.

Elle était accordée aux entreprises qui étaient assujetties à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des BIC, BNC ou BA, qui étaient adhérentes à un organisme de gestion agréé, qui réalisaient un chiffre d'affaires inférieur aux limites du régime des micro-entreprises ou des micro-exploitations agricoles et se plaçaient volontairement sous un régime réel d'imposition.

Cette réduction d'impôt permettait aux entrepreneurs individuels qui adhéraient à un organisme de gestion de bénéficier d'une réduction d'impôt correspondant aux deux tiers de leurs frais de comptabilité et d'adhésion à un OGA, plafonnée à 915 euros. Cette réduction d'impôt permettait aux très petites entreprises, qui faisaient le choix d'opter pour la déclaration au réel, d'amortir leurs frais de comptabilité.

Lors des débats sur le projet de loi de finances, un sous-amendement (n° I-2070) proposait de repousser la suppression de cet avantage fiscal au 1er janvier 2027 afin de permettre aux OGA d'adapter leur modèle économique, sous amendement qui a été repoussé. La suppression de cette réduction d'impôt sera donc effective dès l'imposition des revenus 2025.

Dans ces conditions, pourquoi conseiller aux entreprises d'adhérer à un organisme
de gestion ?

Si les organismes n'offrent plus les avantages fiscaux qu'ils offraient, ils conservent toujours quelques prérogatives comme l'examen de conformité fiscale.L'examen de conformité fiscale (ECF) est en effet un outil de sécurisation fiscale pour les adhérents.

L'ECF est accessible à toutes les entreprises, personnes physiques ou morales, exerçant une activité professionnelle sous forme individuelle ou en société, quels que soient leur régime d'imposition et leur chiffre d'affaires. L'ECF porte sur un exercice fiscal et fait l'objet d'un compte rendu de mission transmis à l'administration fiscale. Le recours à l'ECF est signalé dans la déclaration de résultats souscrite par l'entreprise.

L'examen de conformité fiscale (ECF) permet de sécuriser les déclarations fiscales des entreprises. Dans l'hypothèse d'un contrôle fiscal conduisant à un rappel d'impôt sur un point validé, si l'entreprise a, de bonne foi, respecté les recommandations de son prestataire (indiquées précisément dans le compte rendu de mission), aucune pénalité et aucun intérêt de retard ne seront appliqués par la Direction générale des finances publiques (DGFip) au rappel d'impôt. Les clients se trouvent ainsi sécurisés.

Les experts-comptables bénéficient d'un contrôle, d'un deuxième regard. Certains cabinets proposent systématiquement l'examen de conformité fiscale à leurs clients, qu'ils le réalisent eux-mêmes, en interne, ou qu'ils fassent appel à un OGA. L'ECF sanctuarise leur qualité de tiers de confiance auprès de l'administration fiscale. Ce lien entre l'administration fiscale et les experts-comptables est précieux et d'intérêt général notamment en termes de collecte de l'impôt. Par ailleurs, dans un contexte de digitalisation et de lutte contre les illégaux, l'ECF renforce le rôle de l'expert-comptable comme étant un acteur majeur de l'économie.

Les points audités sont les suivants : la conformité du fichier des écritures comptables (FEC) ; la qualité comptable du FEC au regard des principes comptables ; le certificat ou attestation individuelle de l'éditeur du logiciel ou système de caisse utilisé ; le respect des règles sur le délai et le mode de conservation des documents ; le respect des règles liées au régime d'imposition appliqué (régime simplifié, réel normal...) en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au regard de la nature de l'activité et du chiffre d'affaires ; les règles de détermination des amortissements et leur traitement fiscal ; les règles de détermination des provisions et leur traitement fiscal ; les règles de détermination des charges à payer et leur traitement fiscal ; la qualification et la déductibilité des charges exceptionnelles ou encore le respect des règles d'exigibilité en matière de TVA.

De nouveaux services proposés aux adhérents

Par ailleurs, les organismes de gestion se réinventent et développent de nouveaux services susceptibles d'intéresser leurs adhérents. C'est le cas de la formation des entrepreneurs. Depuis toujours, c'est l'une des prérogatives des organismes de gestion, qui offrent un large éventail de formations telles que l'apprentissage des langues, l'informatique, des formations commerciales, en gestion des réseaux sociaux, sur la cybersécurité...

Les OGA proposent aussi la dématérialisation des déclarations fiscales ou encore la restitution de statistiques. En regroupant les données financières de leurs adhérents, les organismes bénéficient d'un échantillon suffisamment important pour permettre aux adhérents de se comparer à leurs concurrents. Les experts-comptables peuvent s'appuyer sur ces données statistiques pour être force de conseils auprès de leurs clients. Notons que d'autres solutions permettent de centraliser les données statistiques, comme Jedataviz.

Certains organismes permettent à leurs adhérents d'accéder à des groupements d'achat et de bénéficier des mêmes avantages que les grandes entreprises. D'autres proposent des locations de bureaux équipés ou organisent des voyages et d'autres événements permettant aux entrepreneurs de partager leurs expériences.

Les organismes de gestion sont à un tournant de leur existence. Les avantages fiscaux qui incitaient les entrepreneurs à adhérer ont été peu à peu abrogés ces dernières années. Parallèlement, de nouvelles missions comme l'examen de conformité fiscale ont vu le jour.

Les organismes sont désormais plus libres dans le choix des services qu'ils peuvent proposer. Certains se regroupent, d'autres disparaissent, beaucoup adaptent leurs statuts et deviennent organismes de gestion mixte (à la fois organismes et associations de gestion). Les offres de services croissent pour un coût d'adhésion très faible (autour d'une centaine d'euros).

Pour les experts-comptables, c'est l'occasion de bénéficier du savoir-faire des OGA et de collecter des données statistiques précieuses en termes de
conseils. Ils peuvent aussi sécuriser leurs clients grâce aux examens de conformité fiscale, avoir un regard externe sur des liasses fiscales et renforcer leurs liens avec l'administration fiscale. Manifestement, les organismes de gestion n'ont pas dit
leur dernier mot.