Le sort des animaux lors de la séparation d'un couple marié ou non

par Caroline Collomb et Jean-Noël Chevassus
Jeudi 3 avril 2025

Les couples voulant se séparer s'interrogent immédiatement sur l'attribution du logement, des meubles, la résidence des enfants. Si la question des enfants reste l'une des priorités à régler, celle concernant les animaux de compagnie se généralise de plus en plus. À qui va-t-on attribuer l'animal qui fait partie intégrante de la famille ? C'est une question que les juges aux affaires familiales ont de plus en plus à trancher.

Selon le baromètre Facco-Odoxa 2024, 61 % des Français possèdent un animal de compagnie, ce qui représente 75, 1 millions d'animaux se répartissant en 16, 6 millions de chats, 9, 9 millions de chiens, 29, 8 millions de poissons, 2, 5 millions d'animaux de terrarium, 3, 7 millions de petits mammifères, 3, 7 millions d'oiseaux et 8, 9 millions d'animaux de basse-cour.

Les animaux de compagnie font l'objet de toutes les attentions des familles, mais il y a aussi les animaux dévolus à un sport, à la chasse ou à l'assistance de victime, qui peuvent générer un conflit dans un couple pour savoir qui le conserve.

Quel est le statut juridique d'un animal de compagnie ?

Le législateur est intervenu le 16 février 2015 (Loi n° 2015-177) afin de remédier juridiquement à une absence de régime particulier pour les animaux. L'article 515-14 du Code civil prévoit donc que : « Les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des biens. »

Toutefois, ce texte ne prévoit aucune disposition particulière en matière de séparation des couples. L'animal de compagnie reste donc soumis aux mêmes règles que les autres biens du couple, tels que les véhicules, les meubles meublants, les vêtements... Il s'agit d'une question purement patrimoniale.

Ces règles vont varier selon que le couple est marié ou non, avec ou sans contrat de mariage. Toutefois, la séparation est l'une des premières causes d'abandon d'un animal. Le juge s'efforce donc de concilier l'intérêt de la famille et de l'animal pour éviter d'en arriver à cette situation douloureuse pour tous. C'est un statut juridique propre mais qui n'octroie pas de personnalité juridique à l'animal.

Le législateur a eu la volonté d'apporter une différence avec les biens meubles, mais lorsque l'on étudie précisément le traitement des difficultés lié au sort de l'animal en cas de séparation, on constate qu'il n'y a finalement pas de différence de traitement.

Qui est propriétaire de l'animal ?

Pour savoir qui est propriétaire d'un animal, il convient de savoir qui a acheté ou adopté gratuitement l'animal. Le nom mentionné sur les documents d'achat comme la facture, un certificat de vente ou d'adoption peut prouver la propriété, tout comme le justificatif du paiement. Il est possible de prendre en compte le nom de celui qui a donné son nom sur la carte d'identification de l'animal lorsqu'il a été tatoué ou pucé. En cas de cadeau, c'est le bénéficiaire du don qui sera réputé être le propriétaire. Bien évidemment, la preuve est libre et plus il y aura d'éléments pour démontrer la propriété, moins il pourra y avoir de contestation.

Pour les couples mariés à la date à laquelle l'animal rentre dans la famille, l'animal sera soit un bien commun, soit un bien propre ou indivis en cas de contrat de mariage prévoyant la séparation de biens. Lorsque le couple n'est pas marié, l'animal appartiendra soit à l'un des deux, en bien propre, soit aux deux en indivision. L'attribution de l'animal entraîne l'attribution de tous les accessoires liés à l'animal, comme son panier, sa laisse, son sac de transport, sa cage...

Quelle procédure pour les couples mariés ?

L'attribution d'un animal de compagnie pour les couples mariés doit être intégrée dans la procédure de divorce, avec une attribution de la jouissance provisoire pendant la phase des mesures provisoires ; puis, l'attribution devient définitive lors du jugement de divorce. Une clause dite d'attribution de l'animal doit être spécifiée dans les conventions de divorce par consentement mutuel par acte d'avocat, enregistrées par un notaire. En fonction de la valeur de l'animal, il doit en être fait mention dans l'acte liquidatif du régime matrimonial. Ce sera souvent le cas des animaux de race ou d'animaux ayant une valeur vénale importante comme les chevaux. S'il y a une question s'agissant de la valeur de l'animal, le juge pourra ordonner une expertise pour déterminer sa valeur.

Quelle procédure pour les couples non mariés ?

L'attribution d'un animal de compagnie pour les couples non mariés, pacsés, ou vivant en union libre, est tranchée par le juge aux affaires familiales lors de la procédure de partage d'indivision.

Quelles décisions sont-elles rendues par les juges ?

Le juge aux affaires familiales compétent devra prendre en compte certains critères pour confier la garde de l'animal à l'un ou l'autre membre du couple. La jurisprudence a dégagé les éléments suivants : les conditions d'accueil de l'animal (maison, jardin, espace approprié pour ses promenades, ses besoins naturels...), l'intérêt des enfants du couple (l'animal de compagnie qui bien souvent a grandi avec les enfants va pouvoir rester avec eux), l'aptitude de chacun des maîtres à s'occuper de l'animal (qui réalisait les promenades, les rendez-vous vétérinaires, les soins de toilettage...), le besoin d'assistance d'un des propriétaires ou des enfants (animal d'assistance pour gérer les émotions ou pour guider les personnes malvoyantes), lequel participait aux dépenses d'entretien et de soins de l'animal (nourriture, soins, dressage, assurance, équipements...). Là encore, la preuve est libre et en général, les parties vont verser aux débats des factures, des photographies ou des attestations pour démontrer l'intérêt d'attribuer à l'un des deux l'animal dont il s'agit.

Le juge peut donc confier l'attribution de l'animal, soit à l'un, soit à l'autre, soit suivre les enfants qui résideraient en résidence alternée. En pareille hypothèse, il faudrait aussi pouvoir déterminer qui prendrait en charge certains frais pour l'animal afin d'éviter de nouveaux conflits. Cette solution reste peu fréquente. Le juge peut aussi accorder un droit de promenade à l'autre avec une durée et une fréquence déterminée.

En cas de pluralité d'animaux, le juge peut, soit les confier tous à une personne, soit faire une attribution animal par animal. En effet, rien n'oblige un chien de continuer de vivre avec un chat.

Celui a payé des frais pour l'animal, pour le compte de la communauté ou de l'indivision, aura droit à un remboursement des dépenses engagées pour la conservation du bien indivis, c'est-à-dire des frais d'entretien et de gardiennage de l'animal.

Quelles sont les formalités à accomplir lorsque l'animal est attribué ?

Si l'animal est tatoué ou pucé, il est identifié au fichier national d'identification des carnivores domestiques (I-Cad) ou au fichier national d'identification de la faune sauvage protégée (I-Fap). Celui qui obtient l'attribution de l'animal doit effectuer, s'il y a lieu, le changement de détenteur auprès du gestionnaire du fichier concerné, mais aussi réaliser toutes les formalités liées à l'animal (délivrance d'un permis de détention d'un chien auprès de la mairie).