Comment aider votre enfant à ne pas être pris dans votre conflit parental ?

par Me Amandine Vachoux
Vendredi 11 avril 2025

La relation co-parentale est le soutien réciproque que les parents vont s'apporter dans leurs relations à l'enfant. Mais en cas de séparation, vous pouvez faire face à des désaccords continus avec le co-parent. Votre enfant souffre de la situation, se retrouvant exposé aux conflits chroniques ou à des scènes d'agressivité entre ses parents. La coordination parentale est peut-être un soutien fait pour vous.

Historique et définition de la coordination parentale

Aux États-Unis dans les années 1980, l'adoption des lois sur le divorce sans faute a amené un taux plus élevé de dissolution des mariages. En parallèle, l'évolution démographique s'est accrue avec une promotion de l'égalité des responsabilités parentales et du temps partagé.

Les juges ont alors été confrontés à un niveau plus élevé des conflits parentaux lors des séparations, certains de ces conflits se prolongeant après la séparation et les enfants se trouvant au cœur des conflits avec un effet désastreux sur eux.

Un certain nombre de recherches ont démontré que la poursuite des conflits intenses après une séparation ou un divorce engendrent un risque beaucoup plus élevé chez les enfants de troubles comportementaux, sociaux et émotionnels.

Lorsque ces difficultés de coordination se cristallisent, cela forme un contexte de développement qui n'est pas optimal pour l'enfant, et les recherches ont largement montré que la non-coordination entre les parents a une incidence négative sur le développement émotionnel des enfants, qui ont tendance à développer davantage de difficultés de type anxiété, troubles du comportement, mais également au niveau du développement cognitif et intellectuel.

C'est dans ces conditions et face à ces constats que la coordination parentale s'est développée en Amérique du Nord dès les années 1990. En France, elle a été introduite en 2021 sous l'impulsion de Marie-Clotilde Danis et se diffuse progressivement dans les juridictions francophones d'Europe.

Plusieurs juges aux affaires familiales français ont ainsi commencé à désigner des coordinateurs parentaux et de nombreux autres s'intéressent de près à cette nouvelle approche, qui est au service de l'intérêt supérieur de l'enfant et de la parentalité (tribunaux de La Rochelle, de Bergerac, des Sables-d'Olonne, d'Angers, de Privas, de Toulouse, de Rennes et de Grenoble).

La coordination parentale a pour but d'aider la famille à mieux gérer l'après-séparation et à s'adapter aux changements induits par celle-ci. Le coordinateur parental apporte son soutien aux parents dans l'exercice de leurs responsabilités parentales, mais aussi aux enfants, en leur permettant de s'exprimer dans un cadre sécurisé.

La coordination parentale est un mode hybride de règlement des différends parentaux, qui a été spécifiquement conçu pour répondre aux problématiques des séparations complexes, notamment quand la médiation n'est pas envisageable ou pas suffisante pour rétablir un environnement stable et sécurisant pour les enfants.

La coordination parentale permet de traverser les difficultés pour qu'un équilibre puisse être retrouvé afin de permettre aux enfants de grandir sereinement. L'idéal est une alliance fonctionnelle entre les parents.

Toutefois, d'après les études de Maccoby & Mnookin et Sullivan il existe quatre types de coparentalité post-séparation :

- La coparentalité conflictuelle : conflits importants et fréquents, mauvaise qualité de communication, difficulté à se désengager émotionnellement, faible degré de coopération,

- La coparentalité mixte : les parents font leur possible pour coopérer, mais le conflit demeure élevé,

- La coparentalité parallèle : l'interaction parentale est minimale, il y a un désengagement émotionnel des parents l'un envers l'autre, ils exercent leur rôle séparément, la conflictualité est faible,

- La coparentalité coopérative : les parents se coordonnent et se soutiennent, il y a un niveau élevé de coopération et de communication et de flexibilité, il y a une faible conflictualité.
Avec l'aide du coordinateur parentale, les parents vont pouvoir se situer dans leur coparentalité et travailler vers une coparentalité qui leur permettra notamment de ne pas interférer avec la parentalité de l'autre parent pour le bien-être de leur enfant et un juste équilibre selon la situation qu'ils ont vécu.

Le rôle du coordinateur parental

Le coordinateur parental a pour objectif de permettre aux enfants de parents séparés de grandir dans un environnement suffisamment sécurisant, en facilitant au quotidien l'exercice partagé des responsabilités parentales, malgré la crise engendrée par la séparation.

Il accompagne les parents, en proposant des éclairages conceptuels et théoriques aux parents pour les sensibiliser à la compréhension des mécanismes du conflit, aux enjeux de la séparation, aux conséquences et à l'impact sur les enfants de conflits prolongés ou de la violence.

Il a la responsabilité d'utiliser de façon systématique des outils de dépistage de la violence, afin de distinguer ce qui relève du conflit parental ou de la violence conjugale et intrafamiliale / contrôle coercitif. Il peut mener l'ensemble du processus sans que les parents n'aient à se retrouver en séance conjointe.

Il aide les parents à clarifier l'exercice de leur autorité parentale et à mettre en place soit une parentalité collaborative minimale, soit une parentalité en parallèle.

Il guide, il soutient les parents dans leur communication au sujet de leurs enfants, il joue un rôle de facilitateur en tant que tiers et il aide les parents à mettre en œuvre une organisation fonctionnelle.

Le coordinateur parental va se focaliser sur l'articulation des rôles parentaux autour des besoins de l'enfant, la mise en place d'une organisation précise et d'une communication parentale respectueuse, plus que sur la recherche d'une amélioration de la relation entre les ex-conjoints.

Les modalités de la coordination parentale

- Travail avec chacun des parents individuellement,

- Rencontres parentales conjointes, uniquement si les conditions le permettent,

- Rencontre des enfants,

- Établissement d'un calendrier des rencontres qui doit être respecté,

- Entre chaque rencontre, l'échange s'effectue uniquement par mail si nécessaire. C'est seulement le coordinateur parental qui appelle le ou les parents,

- Si les parents ont des avocats, ils doivent s'engager au préalable en signant une charte,

- Organisation de séances plénières avec le coordinateur parental, les avocats et les parents, afin de rechercher des accords.

Le coordinateur parental va travailler avec les parents dans un processus structuré, et également se mettre en lien avec tous les professionnels qui entourent les parents et l'enfant.

L'avocat conseille son client tout au long de l'accompagnement et le coordinateur parental le consulte en cas de difficulté.

Il s'agit d'un véritable travail collaboratif entre tous les professionnels accompagnant les parents et les enfants.

L'engagement réciproque de chacun des parents

Les parents doivent prendre conscience de leurs émotions, pour pouvoir répondre à leur besoin et reprendre leur rôle de co-parent.

Il est de la responsabilité de chacun de faire grandir son enfant dans un contexte non-conflictuel afin que l'enfant s'épanouisse.

La coordination parentale ne pourra se dérouler qu'après un engagement écrit des deux parents.

L'AFOCPA, association francophone des coordinateurs parentaux a été créée afin de garantir la formation de ses membres. Des avocats, des magistrats, des médiateurs familiaux, des psychologues se sont formés à cette méthode innovante afin d'aider les parents dans leur coparentalité post-séparation.