Les mouvements circulaires du Ballet et de l'Opéra
Danse contemporaine / Alors que le concerto de Lucinda Childs entre au répertoire du Ballet et que Noé Soulier reprend le solo "Self Duet", c'est la chorégraphe au travail spectral Nacera Belaza qui sera l'évènement du programme "À l'infini" pour clore cette saison de l'Opéra de Lyon.

Photo : Concerto - Chor. Lucinda Child © Opéra de Lyon
Commencer par faire le vide. Voilà comment la chorégraphe franco-algérienne Nacera Belaza entame chaque nouvelle session de travail. Sur le site de la compagnie qui porte son nom et qu'elle a créée en 1989, elle ne dit pas autre chose en parlant d'un « vide inattendu qui comble toutes nos attentes (...) le sculpter, lui donner un corps, le rendre palpable, le partager et enfin le dissoudre dans l'espace infini de nos corps ».
Cette autodidacte, marquée au fer rouge par le clip Billie Jean de Michael Jackson, creuse une veine plus éthérée que la star de la pop, elle se nimbe d'ailleurs souvent de noir. C'est son art de la répétition et du tournoiement qu'elle met pour la première fois au service d'un autre collectif que le sien, celui du Ballet de l'Opéra de Lyon. Untitled 1 réunit 14 danseurs parmi la trentaine que compte le Ballet et il sera question, confie la chorégraphe, de « shamans et de magiciens » pour chercher le commun au tréfonds des interprètes, plutôt que leurs particularités. Elle envisage de s'adresser à un public qui, malgré le rapport classique et frontal face à la scène, n'est « pas spectateur mais fait partie de l'expérience ». Pour pousser plus loin ce partage, elle accorde une importance toute particulière au son et la lumière qu'elle avait l'habitude de signer dans ses précédents spectacles (La Nuée, L'Envol...). Cette fois-ci, c'est Éric Soyer qui la prend à bras-le-corps. Celui qui, avec ses découpes de lumière ultra précises, fabrique en quelque sorte les décors de toutes les pièces de Joël Pommerat.
Répertoire et création
Cette obsession du cercle est la clef de voûte du programme conçu par le directeur du Ballet, Cédric Andrieux pour clore la saison 2024-2025. Il l'a opportunément nommé À l'infini. En plus de cette création de Nacera Belaza pour le corps de danseuses et danseurs, il a adjoint une reprise et une entrée au répertoire. La reprise est celle de Self Duet, créée sur le plateau des Subs sous la Tornade en papier froissé d'Alexis Merat et de Domitille Martin par le chorégraphe français Noé Soulier en 2021. Cette pièce pour un seul interprète (en l'occurrence deux en alternance) vibre au son du Grand Caprice issu de l'opus 26 Le Roi des Aulnes du violoniste Heinrich Wilhelm Ernst, composé d'après l'œuvre éponyme de Schubert. C'est une nouvelle démonstration de la recherche expérimentale des relations entre danse et musique que poursuit l'actuel directeur du Centre national de danse contemporaine d'Angers.
Enfin, pour parfaire ce programme, c'est le retour d'une chorégraphe majeure de ces dernières décennies et de la post-modern dance, collaboratrice de créateurs phares tels l'homme de théâtre Bob Wilson (on peut citer le fameux Einstein on the beach !), le compositeur Philip Glass ou le plasticien Sol LeWitt : il s'agit de Lucinda Childs. L'Américaine entre au répertoire du Ballet de l'Opéra de Lyon pour la troisième fois seulement après Perfect Stranger en 1990 et Dance en 2020. On découvrira donc Concerto, créé en 1993, sur la composition pour clavecins et cordes d'Henryk Górecki, et qui joue avec des gestes minimaux et d'hypnose.
À l'infini
Untitled 1, chor Nacera Belaza / Self Duet, chor. Noé Soulier / Concerto, chor. Lucinda Childs
Du 4 au 9 juillet 2025 à 20h à l'Opéra de Lyon (Lyon 1er) ; de 10 à 48€