The Ugly stepsister, la plus belle pour aller danser

Miroir miroir / Un conte de fée cauchemardesque, généreux dans ses excès et fidèle à son propos.

Photo : The Ugly stepsister © 2025 ESC Films - MAY Films

Alors que les studios hollywoodiens (Disney en tête) n'ont de cesse de réviser les contes de fées de manière opportuniste, la Norvégienne Emilie Blichfeldt a décidé de livrer sa vision toute personnelle de Cendrillon. Dans cette variation libre et débridée, Elvira, une jeune femme complexée, espère conquérir le cœur d'un beau prince. Son désir se heurte aux innombrables soupirantes, au monde violent qui l'entoure et à une belle-sœur au charme vénéneux. 

Conte défait

Dès son introduction, The Ugly stepsister présente une héroïne bercée de rêves et de fantasmes tout droit sortie de romances fleur bleue. Des passages oniriques clichés émaillent le récit, venant l'extirper d'un quotidien sclérosé, régi par des règles absurdes. Car ici, les hommes (personnages répugnants ou brutaux) dictent chaque étape de la vie des femmes. La survie d'Elvira dépend ainsi du remariage de sa mère avec un riche propriétaire. Une manière d'offrir un contre-champ à l'univers idyllique des contes, pourtant parfaitement respecté. Des prétendantes invitées par un beau prince à un bal, des crédits à la typographie rose bonbon, une valse enivrante : tous les éléments sont présents, mais contrebalancés par une noirceur douloureuse. À commencer par la manière de prendre littéralement la métaphore associant la souffrance à la beauté (ou plutôt ses canons en vigueur). La réalisatrice a recours à une bande originale au synthétiseur afin d'appuyer (de manière trop insistante) la contemporanéité de son propos, tel un clin d'œil visant à créer la connivence avec son spectateur. Cette afféterie postmoderne, l'inscrit dans le sillage du Marie-Antoinette de Sofia Coppola auquel s'ajoute un esprit frondeur. 

Oh my gore !

Pourtant, davantage que de l'autrice de Virgin Suicides, Blichfeldt entend se rapprocher de l'héritage déconstruit de Yórgos Lánthimos tendance La Favorite, avec moins de rigueur mais une aspiration manifeste aux excès et aux débordements. Le film n'hésite pas, en outre, à se montrer d'une générosité peu commune lors de ses séquences morbides et sanglantes. Un plaisir jouissif du gore qui tâche, pas si éloigné des partis pris de The Substance, qui l'ancre dans une viscéralité certaine. Ici, l'oppression passe évidemment par leur corps, des mutilations (prémices de la chirurgie esthétique) à cette interdiction de montrer son appareil dentaire. La réalisatrice multiplie les effets choc, insiste sur des détails morbides (le cadavre en décomposition, des séquences renvoyant à Dario Argento ou Lucio Fulci) et se montre même étonnamment poétique à l'instar du générique littéralement en forme de nature morte. S'il peut souffrir de menus défauts, revers d'un appétit qui ne semble jamais véritablement rassasié, The Ugly stepsister a le mérite de dépoussiérer les codes d'une manière franche, brutale, radicale et douloureuse. 

The Ugly stepsister
D'Emilie Blichfeldt (Norvège, Suède, Pologne, Danemark, 1h45) avec Lea Myren, Thea Sofie Loch Næss, Ane Dahl Torp... En salle le 2 juillet 2025.

The Ugly Stepsister

sortie nationale : Mercredi 2 juillet 2025
De Emilie Blichfeldt Avec Lea Myren, Thea Sofie Loch Næss, Ane Dahl...

Dans un royaume où la beauté règne en maître, la jeune Elvira doit faire face à une redoutable concurrence pour espérer conquérir le cœur du prince. Parmi les nombreuses prétendantes, se trouve notamment sa demi-sœur, à l'insolente... Lire +