À Lyon, la taxe Zucman fait peu de bruit parmi les grandes fortunes

Publié Mercredi 15 octobre 2025

Taxe / Alors que la "taxe Zucman" sur les très grandes fortunes s'invite dans le débat national, les réactions se font rares à Lyon. Peu de familles seraient concernées, mais le sujet divise, entre volonté de justice fiscale et crainte d'une atteinte à l'outil économique.

Photo : Image par Alexa de Pixabay

Tandis que le gouvernement cherche à combler un déficit public abyssal (3 345, 8 milliards d'euros, soit 114 % du PIB à la fin du premier trimestre 2025). Le débat sur la "taxe Zucman" - un impôt plancher sur les ultra-riches - s'est invité dans l'hémicycle, dans les médias et jusque dans les cercles économiques lyonnais. L'idée, défendue par l'économiste Gabriel Zucman, vise à imposer un taux minimal d'imposition de 2 % sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros. Une mesure qui ne concernerait qu'une poignée de foyers en France - 0, 01% des contribuables les plus riches, mais divise les français. 

Une taxe symbolique mais complexe

La "taxe Zucman" entend instaurer une forme de « justice fiscale » en s'assurant que les plus grandes fortunes ne soient pas proportionnellement moins taxées que le reste de la population. Dans le détail, le dispositif prévoit qu'aucun foyer dont le patrimoine dépasse 100 millions d'euros ne puisse échapper à un taux global d'imposition inférieur à 2 %. Si le total de ses impôts - sur le revenu, sur le patrimoine ou sur les plus-values - tombe en dessous de ce seuil, un impôt complémentaire viendrait compenser la différence.

Contrairement à l'actuel impôt sur la fortune immobilière, limité aux biens immobiliers non professionnels au-delà de 1, 3 million d'euros, la taxe Zucman intégrerait tous les actifs : placements financiers, actions, parts d'entreprises ou biens professionnels. Une extension qui inquiète les entreprises, notamment sur la valorisation des actifs fluctuants : « la taxe intègre dans la fortune de papier des valorisations de l'instant », estimait récemment Jean-Michel Aulas sur RTL. L'ancien patron de l'OL, désormais candidat aux municipales, se dit favorable à une contribution accrue des plus aisés, « mais pas sur l'outil de travail ».

Les fortunes lyonnaises dans le viseur

À Lyon, les données de la Direction générale des Finances publiques rappellent l'échelle du sujet : 2 569 foyers étaient redevables de l'IFI en 2023, avec un patrimoine moyen de 2, 4 millions d'euros - bien loin des seuils visés par la taxe Zucman. Mais selon le classement annuel du magazine Challenges, une poignée de familles lyonnaises figurent parmi les plus grandes fortunes françaises et seraient théoriquement concernées. Mérieux, Dentressangle, Latouche (Fiducial), Lescure (SEB), Gandry et Baguenault de Puchesse (Descours & Cabaud), Bahadourian (Grand frais), Guigal ou encore Ginon (GL Events).

Pour l'heure, seule la famille Aulas s'est exprimée. Dans une interview pour Tribune de Lyon, Alexandre Aulas, président de Thrillstage et directeur général d'Holnest, regrettait que « l'on mélange tout ». Selon lui, « Le patrimoine de l'entreprise, il est réalisé ou il n'est pas réalisé, c'est comme les actions en Bourse. On le voit bien avec les fluctuations du patrimoine des plus grosses fortunes : un jour, c'est Oracle, un autre Elon Musk... Ça n'a pas de réalité ». Une position partagée par de nombreux acteurs économiques, qui jugent la mesure mal calibrée pour les patrimoines en grande partie constitués d'actifs professionnels.

Un avenir politique incertain

Si la taxe a trouvé un écho favorable à gauche, le gouvernement reste, lui, circonspect. Dans son discours de politique générale prononcé hier à l'Assemblée nationale, le Premier ministre, Sébastien Lecornu ne s'est pas prononcé en faveur de la mesure, mais a proposé une alternative. Ainsi, le projet de loi de finances pour 2026 prévoit l'instauration d'une taxe de 2 % sur les holdings patrimoniales. Une solution peu satisfaisante pour la gauche, les holdings étant souvent accusées d'être utilisées comme moyen d'optimisation fiscale puisqu'elles permettent, entre autres, de profiter d'une exonération de l'impôt sur les sociétés sur les dividendes perçus des filiales. 

Au micro de BFMTV/RMC aujourd'hui, le président du Parti socialiste Olivier Faure a fait savoir qu'il entendait proposer la taxe Zucman par amendement. Et si celle-ci n'est pas adoptée, qu'il prévoyait « d'autres propositions sur toute une série qui vise les grandes fortunes, les grands patrimoines et les grandes entreprises. » Le texte, rejeté par le Sénat en juin dernier, pourrait donc être remanié dans les prochains mois, mais sa trajectoire législative semble compromise.

Les plus grandes fortunes lyonnaises selon Challenges (2024)

16e - Alain Mérieux et sa famille (Biomérieux) : 9, 45 milliards €
35e - Famille Dentressangle (Dentressangle) : 3, 5 milliards €
54e - Michel Reybier (Domaines Reybier) : 2, 3 milliards €
59e - Christian Latouche (Fiducial) : 2, 1 milliards €
68e - Famille Lescure (Groupe SEB) : 1, 95 milliard €
106e - Familles de Gandry et Baguenault de Puchesse (Descours & Cabaud) : 1, 25 milliard €
124e - Sébastien Aguettant (Delpharm) : 1, 1 milliard €124e - Léo et Patrick Bahadourian (Grand frais) : 1, 1 milliard €
133e - Bruno Rousset (Evolem) : 1, 05 milliard €
309e - Jean-Michel Aulas et sa famille (Holnest) : 450 millions €322e - Guy Mathiolon (Serfim) : 420 millions €
368e - Christophe Gruy (Maïa) : 370 millions €
433e - Marcel Guigal (Guigal) : 300 millions €492e - Olivier Ginon (GL Events) : 255 millions €