Les concerts indispensables de décembre, sur le fil du froid

Publié Jeudi 27 novembre 2025

Sélection / Décembre ouvre un territoire de métamorphoses où les sons se frottent, se heurtent, se ressaisissent. Mettant en tension matière brute, silences et stridences, surgissements intimes et forces telluriques, les salles de la métropole dessinent pour cette fin d'année une cartographie intranquille, peuplée de nombreuses façons de traverser la nuit.

Photo : Baxter Dury ©Tom Beard

The tubs

Jangle rock / Avec leur deuxième album Cotton crown, The tubs affinent une esthétique où l'héritage du passé est remis au travail par une sensibilité pleinement actuelle. Sous la précision lumineuse des guitares affleurent des motifs plus abrupts (pertes, corps vulnérables, humeurs vacillantes) non pas comme contrepoids, mais comme matière même de la dynamique musicale. Une coexistence qui n'est jamais démonstrative, s'avérant le produit d'une écriture exigeante où la clarté n'abolit pas la gravité, et où l'élan mélodique persiste malgré les lignes de fracture qu'il traverse. Une manière d'articuler le présent en tenant compte de ce qui le ronge. FM

The tubs et Lùlù
Jeudi 4 décembre 2025 à 20h30 au Sonic (Lyon 5e) ; de 10 à 12€


Ange

Rock progressif / Cinquante-six ans d'histoire et jamais un pas de côté : le projet angélique traverse les ères sans craindre l'usure, monstre sacré de la musique progressive. Chaque album de cette discographie-monde renferme ses paysages fantastiques, utopiques, auréolés d'archétypes intemporels. Avec Cunégonde, disque paré d'une narration féerique et allégorique, Ange réaffirme son habileté à forger de nouveaux imaginaires. Après les adieux scéniques de Christian Décamps, la flamme circule, portée par l'élan collectif et la présence tutélaire de son fils Tristan. Le nom Décamps, désormais inscrit au panthéon musical mondial, continue de rayonner au Jack Jack. FM

Ange
Vendredi 5 décembre 2025 à 20h au Jack Jack (Bron) ; 30, 99€


Baxter Dury

Electropop / Depuis vingt-cinq ans, Baxter Dury façonne une discographie où la douceur mélancolique côtoie un regard sarcastique souvent tourné vers soi, subterfuge pour tenir le monde à distance sans jamais renoncer au charme. Son univers oscille entre shoegaze bruyant, britpop rugueuse et ambient jonchée d'épaves nostalgiques, le tout porté par le dialogue fondateur entre son parlé-chanté nonchalant et les voix féminines qui en sculptent les reliefs. Le récent Allbarone, loin d'incarner un tournant électronique, est l'aboutissement lumineux de son alliance décennale avec le romantisme trouble du dancefloor, un récit quasi cyberpunk où le musicien de Wingrave se réinvente sans se trahir. FM

Baxter Dury et Joshua Idehen
Samedi 6 décembre 2025 à 20h au Transbordeur (Villeurbanne) ; 33€


Rival consoles

Electro / Refusant toute texture vaporeuse, enveloppante ou complaisante, le minimaliste minutieux de Rival consoles adopte une esthétique urgente mais jamais agressive. Le projet de Ryan Lee West façonne un son ancré dans le réel : une matière précise, presque tactile, qui ouvre une brèche temporelle où se déploie une articulation sonore et visuelle immersive. Son live visuel au Sucre est l'occasion de découvrir la force d'un langage musical qui se structure comme une trajectoire de vie : évolutive, inéluctable, profondément humaine. FM

Rival Consoles, Lyrs, Modhérée, Odalie et Mesh
Dimanche 7 décembre 2025 à 18h au Sucre (Lyon 2e) ; de 0 à 17€


Soledad Zarka et Loup Uberto

Performance sonore et chorégraphique / Poursuivant une véritable « archéologie du geste laborieux », le duo convoque autant la mémoire d'un univers sonore lié au travail humain passé que sa réincarnation dans une théâtralité minimale, dense et précise. Leur proposition s'appuie sur une matérialité fragmentaire, traversée par une spectralité active : il ne s'agit pas d'emmener l'audience dans un voyage dans le temps, mais de faire s'échouer le passé dans le présent. De cette collision naît une danse heurtée de matières et de récits, où les gestes, les sons et les traces se réagencent en temps réel. FM

Soledad Zarka et Loup Uberto
Mardi 9 décembre 2025 à 21h au Périscope (Lyon 2e) ; de 8 à 10€


Gojira

Metal / Depuis la parution de leur manifeste From Mars to Sirius en 2008, désormais inscrit au panthéon du genre, Gojira s'est affirmé comme l'une des figures majeures du metal contemporain. D'abord forgée dans un death technique et implacable, la formation landaise a su élaborer au fil des ans une grammaire propre, faite de grondements telluriques, de ferveur vocale et d'une écriture progressivement plus introspective et intense. À la veille d'un nouvel album annoncé pour l'an prochain, le public est convié à renouer avec cet univers où se conjuguent écologie militante et appel à la résilience, retrouvant la puissance fédératrice d'un véritable monument vivant du metal français. FM

Gojira
Mercredi 10 décembre 2025 à 20h à la LDLC Arena (Décines-Charpieu) ; de 52 à 85€


Théo Charaf

Blues / Chez Théo Charaf, le blues se manifeste moins comme un héritage à préserver que comme une matière mouvante, stratifiée, où s'entrelacent survivances et bifurcations. Sa voix grave, granuleuse, presque minérale, convoque des présences, tandis que sa guitare explore la tradition avec la patience d'un artisan qui façonne plutôt qu'il ne reproduit. Les morceaux avancent ainsi par rémanences, laissant affleurer des hommages, intégrés au geste plutôt qu'exposés. Son blues n'est ni revival ni pastiche, mais un organisme vivant, où la mémoire circule, se tord, se régénère, faisant du présent l'un de ses lieux de passage. FM

Théo Charaf et Prokop
Jeudi 11 décembre 2025 à 20h30 au Kraspek myzik (Lyon 1er) ; de 6 à 16, 5€


La meute

Spoken word / Chez La meute, un souffle archaïque affleure, discret mais tenace, comme une présence à la fois brumeuse et verbale. Il revient par intermittence, dans la tension du tissage des mots : une trame où passé et présent, imaginaire et quotidien se frôlent en éclats discrets. Les quatre musiciennes prolongent ce frémissement en mêlant jazz, impulsions rock et fulgurances slam, donnant à la parole poétique une matière capable de s'insinuer jusqu'à la sensibilité à vif. Ici, pas d'habillage mélodique superflu : on vise l'essentiel, droit devant, sans compromis. Une poésie qui entre dans l'ombre et qui murmure, rageuse : « Je ne suis pas calme. Et je t'emmerde. » FM

La meute et Lodeup
Vendredi 12 décembre 2025 à 20h30 à Tout bout d'chant (Lyon 1er) ; de 8 à 12€


Dakeez

Rap / Quadruple champion de France de hip-hop, champion d'Europe de street dance... Le Lyonnais Dakeez arrive dans la musique fort de talents déjà reconnus. Il insuffle une irrésistible fraîcheur au RnB hexagonal en assumant des références anglo-saxonnes (The Weeknd et Partynextdoor pour les plus connues) dopées par de puissantes nappes électroniques. Surtout, à la faveur de singles comme SHINE ou SUPERSTAR, il dégage une aisance contagieuse derrière le micro : les gimmicks et les mélodies accrochent tandis que la sensation d'une couleur sonore inexplorée en France afflue. VN

Dakeez
Vendredi 12 décembre 2025 à 20h à La Marquise (Lyon 3ᵉ) ; 24 €


Pain magazine

Post-hardcore industriel / Pain magazine n'est pas une simple rencontre pacifiée entre deux esthétiques : c'est une collision frontale, une conflagration où s'entrechoquent la rudesse douloureuse de l'immédiateté hardcore de Birds in Row et la froideur clinique de l'électronique industrielle de Maelstrom & Louisahhh. Leur musique, tendue et douloureuse, déploie une énergie capable de ravager l'espace et le temps. Cette brutalité n'est toutefois jamais gratuite mais reflète et sculpte les thématiques qui traversent le projet : l'antagonisme d'un monde extérieur gouverné par la violence et l'avidité, face aux conflits intérieurs qui rongent les corps et les psychés. Une claustrophobie sonore révélatrice. FM

Pain magazine
Vendredi 12 décembre 2025 à 20h30 à l'Épicerie moderne (Feyzin) ; de 7 à 23€


L'amour et la mer

Musique classique / Ernest Chausson ne mit rien moins qu'une dizaine d'années (1882-1892) pour composer son chef-d'œuvre inclassable (à la fois cycle de mélodies, cantate profane et monologue), Poème de l'amour et de la mer, à partir de six poèmes de son ami Maurice Bouchor. Cette œuvre poignante pour voix et orchestre sera complétée au programme de l'ONL par la musique pour ballet de Stravinski, Pulcinella, nettement plus légère. JED

L'amour et la mer
Les 18 et 20 décembre 2025 à l'Auditorium (Lyon 3e) ; de 10 à 54 €


Camille Thouvenot Mettà Trio

Jazz / Le trio du pianiste Camille Thouvenot, auquel se joignent Christophe Lincontang à la contrebasse et Andy Barron à la batterie, nous donne rendez-vous au Hot club afin de découvrir le second chapitre de leur parcours. Après une étape fondatrice marquée par Crésistance, premier opus intense et engagé, InTriospection, dévoilé l'an passé, approfondit cette trajectoire en mêlant écriture précise et sens aigu du relief sonore. Les phrasés de velours, ponctués de ruptures discrètes et d'harmonies légèrement assombries, matérialisent la nécessité de transformer l'intime en champ d'expérience. FM

Camille Thouvenot Mettà Trio
Vendredi 19 décembre 2025 à 20h30 au Hot club (Lyon 1er) ; de 0 à 19€