Explore Lyon antique : immersion à Lugdunum

Publié Vendredi 17 octobre 2025

Lugdunum - musée et théâtres romains a inauguré son nouveau dispositif pour parcourir la ville... il y a 2000 ans. Un accompagnement multiple a été déployé dans les théâtres romains, mêlant médiation "classique", réalité virtuelle, podcasts et maquette 3D.  

Photo : ©Lugdunum - musée et théâtres romains

« On nous a fait remonter un besoin, à plusieurs reprises : les Lyonnais rencontrent des difficultés à comprendre la prestigieuse histoire de Lyon, à se la figurer », ainsi a débuté la prise de parole de Claire Iselin, directrice de Lugdunum, musée et théâtres romains lors de la conférence de presse du 14 octobre dernier, présentant le premier accomplissement d'un travail de trois ans, Explore Lyon antique. Fort d'une fréquentation en hausse régulière (+30, 5 entre 2023 et 2024, +6, 8% entre 2024 et 2025), le musée poursuit son entreprise visant à moderniser ses procédés de médiation. En cette 50e année d'existence du musée, c'est au tour du parcours extérieur d'être renouvelé, une première depuis 20 ans.

Si le dispositif n'est pas encore tout à fait achevé, on peut dès aujourd'hui jouir du premier fruit d'un travail de trois ans, qui a été déployé sur le site jouxtant le musée métropolitain, celui des théâtres romains. Cela devrait être suivi, d'ici la fin du printemps par des dispositifs similaires dans cinq autres lieux comportant des vestiges dans le 5e arrondissement : Les Thermes de la rue des Farges, les Mausolées de la place Wernert, la Pile de l'acqueduc, rue de Radisson, le Parc archéologique de Saint-Just et la basilique de Saint-Laurent de Choulans.

Au premier abord, on observe surtout les 22 nouveaux panneaux explicatifs, qui accompagnent la déambulation des curieux comme des habitués. Des blocs de béton, aux formes arrondies qui se fondent dans le décor minéral de l'amphithéâtre. Les plaques explicatives sur fond vert sapin sont écrites en gros, en anglais et en français, tout en respectant les méthodes FALC. « L'enjeu est, comme toujours, lié aux contraintes. Il fallait à la fois que le nouveau mobilier se fonde dans le paysage et aussi qu'il ne soit pas implanté directement dans le sol pour protéger le site », détaille Jordan Boucard, en charge de la gestion des sites archéologiques et coordinateur d'Explore Lyon antique. Ceux-ci sont donc autoportants et inamovibles, chacun pesant 300kg.

©Lugdunum - musée et théâtres romains

Immersion 

Ces panneaux comportent tous un QR code individuel, (abréviation de Quick response code, ou "code à réponse rapide" en français), un code-barres bidimensionnel qui permet, en une photo prise avec son smartphone de se retrouver sur une page web du musée, et d'expérimenter une immersion statique dans des décors reconstitués, représentant les lieux 2 000 ans en arrière. En orientant son smartphone de ses propres pieds au ciel, de droite à gauche, en faisant un tour sur soi-même, on peut découvrir la reconstitution en 3D et comparer l'aménagement de l'espace à l'époque avec les vestiges. On peut même agrémenter cette immersion par une petite séance d'écoute d'un des courts podcasts (aussi traduits en LSF) avec l'un des 12 personnages choisis par le musée, qui commente la vue, ou se raconte lui-même, à l'époque antique. Strabon, l'empereur Claude, Claudia Victoria... : les comédiens, tantôt affables, tantôt imbus d'eux-mêmes sont plaisants à découvrir, et le jeu d'acteur est ce qu'il faut de bien joué pour les trouver attachants, sans que le sens ne disparaisse au service de la forme.

Au centre, Claire Iselin, directrice de Lugdunum, à sa gauche, Cédric van Styvendael, vice-président à la culture de la Métropole et maire de Villeurbanne, à droite, Bruno Bernard, président de la Métropole ©LS/LePetitBulletin

Immersion toujours, le musée s'est pourvu de 10 casques de réalité virtuelle, mis à disposition lors de visites commentées. Ainsi, on peut se poster à plusieurs endroits du site pour découvrir les commerces, une fontaine monumentale, des boutiques, les rues, les forums... et se figurer la vie de la cité et son architecture à l'époque, notamment un mur de scène de 30 mètres de haut qu'il aurait été difficile d'envisager sans ce coup de pouce numérique. En revanche, on ne peut pas déambuler avec les casques. D'après Jordan Boucard, il s'agit d'un choix du musée : l'idée est que les visiteuses et visiteurs puissent conceptualiser en comparant les vestiges et la reconstitution d'époque, mais pas que le numérique prenne le pas sur la visite du lieu dans sa forme actuelle.

Sauter au plafond... de l'Odéon
D'après une réétude du plafond de l'Odéon d'Athènes, la toiture de l'Odéon lyonnais a pu être restituée le plus fidèlement possible. Via la reconstitution numérique, on peut donc observer un plafond dit "à caisson" qui surplombe l'Odéon, construit avec des compartiments en creux disposés de façon régulière, les parties saillantes qui les encadrent évoquant une grille avec de grandes ouvertures.

La face émergée de l'iceberg

En tout, c'est 80km² de ville qui ont été restitués sous forme d'une maquette 3D de la ville au IIe siècle, réalisée par les sociétés spécialisées Art Graphique et Patrimoine et Mazedi et sous la houlette d'un comité scientifique composé de spécialistes lyonnais et européens. Art Graphique et Patrimoine a notamment modélisé des villes du pourtour méditerranéen et a reconstitué de sites patrimoniaux syriens détruits par des attaques de Daesh pour sensibiliser sur leur nécessaire préservation.

©Mazedia, Art graphique et patrimoine

Les reconstitutions numériques sont rarement aussi vastes, Explore Lyon antique fait office de pionnière en la matière, et le musée métropolitain tente d'exploiter cette modélisation de plusieurs façons. Il compte amener cette maquette loin des "vieilles pierres" des théâtres romains : la reconstitution pourrait être exploitable sur tablette dans des établissements scolaires, des ehpads... et devrait être mise à jour au gré des nouvelles découvertes des scientifiques. Par exemple, la porte monumentale découverte dans le cimetière de Loyasse il y a moins d'un an pu être ajoutée in extremis dans le dispositif.

Une reconstitution en débat
Le travail de restitution d'une période aussi éloignée, aussi précis soit-il, peut comporter quelques incertitudes. Explore Lyon antique a pris le parti, par exemple, de placer un cirque dans sa ville numérisée. Si les experts savent qu'il y avait un cirque dans la ville il y a 2000 ans, ils sont moins sûrs de l'emplacement précis de celui-ci. Ils ont donc tablé sur l'hypothèse la plus probable : l'emplacement de la fouille de Michèle Monin à Loyasse.

Gratuit

La majeure partie de ce dispositif qui a coûté 900 000€ est gratuite et accessible à tous. Même si une belle partie de la déambulation nécessite de posséder un smartphone, outre les explications écrites sur les panneaux, le renouvellement du parcours comporte aussi une maquette tactile en 3D, placée à proximité de l'entrée haute du musée, et un espace ludique avec des éléments à manipuler (à proximité de l'accès rue d'Antiquaille). Les visites commentées avec casque de réalité virtuelle sont à 4€. Finalement, le musée s'est associé au dispositif des Gnolus, permettant aux fans de geocaching de partir en quête de ces drôles de bêtes à collectionner, tout en déambulant dans les vestiges.

©LS/LePetitBulletin

Week-end de découverte d'Explore Lyon antique
Du 18 au 19 octobre 2025 de 10h à 17h30 aux théâtres antiques (Lyon 5e) ; gratuit

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