de Chad Chenouga (Fr., 1h38) avec Khaled Alouach, Yolande Moreau, Laurent Xu...
Lycéen dans un quartier bourgeois, Nassim vit seul avec sa mère dépressive. Lorsqu'elle meurt subitement, l'adolescent est placé dans un foyer mais le cache à son entourage. Refusant la main tendue du monde éducatif et d'être assimilé aux "cas sociaux", il perd ses repères, puis pied...
Quinze ans après 17 rue Bleue, première tentative autobiographique bancale, le réalisateur et acteur Chad Chenouga réussit un admirable portrait d'une jeunesse en souffrance, allant bien au-delà de son expérience personnelle : il réactualise ici les faits afin qu'ils collent à la situation contemporaine. On suit tous les degrés du malaise existentiel du fier Nassim, nourri de culpabilité et de révolte ; son humeur erratique le poussant à rejeter ceux qui l'aident, qui l'aiment.
Chenouga montre ce caméléon écartelé, abandonnant de sa morgue pour être accepté par ses commensaux du foyer mais conservant les richesses inaliénables qui lui permettront de rebondir : les mots qu'il possède (c'est-à-dire ses viatique et sésame pour une vie meilleure) et les souvenirs de sa mère (photo, vêtements, messages), rappel à l'ordre d'un passé malgré tout plus heureux. Protégé par ces fragments poétiques comme une chrysalide veillée par une éducatrice formidable d'humanité (Yolande Moreau), Nassim se réalisera.
Après Ma vie de courgette et La Tête haute, on tient là un nouveau grand film sur l'univers social, où Chenouga transfigure son passé, s'en guérit sans doute, sans nous ensevelir sous le pathos. Bravo.