Joyeux anniversaire ! / Pour les 50 ans du parc national des Écrins, nous avons rencontré Ludovic Schultz, son nouveau directeur depuis février 2023. On a pris des nouvelles du cinquantenaire et discuté des futurs enjeux : refonte de la charte du parc, réchauffement climatique et surfréquentation touristique.
Le parc national des Écrins fête ses 50 ans cette année. Comment va-t-il ?
Après avoir rencontré énormément d'acteurs et d'élus du parc, je constate avec plaisir qu'il est bien accepté par le territoire. Plus de 90% des personnes avec qui j'ai pu discuter m'en disent du bien, elles reconnaissent et apprécient son rôle de médiateur et d'animateur territorial. Elles ont confiance dans le travail que mène le parc, même celles dont a priori on pouvait penser que ça serait plus difficile, par exemple le monde de la chasse. En fait, on partage tous le même souci : préserver cet environnement exceptionnel, conscients que la valeur du territoire repose aussi sur la qualité de son environnement.
Il faut dire que l'histoire du parc est particulièrement marquée par son esprit d'ouverture...
Oui, le parc ne s'est jamais considéré comme une sorte de citadelle assiégée dont il faudrait exclure toutes les activités humaines. Il ne s'est pas construit dans une logique d'opposition avec les acteurs socio-économiques mais de coopération. Avec des règles, bien évidemment : le cœur du parc reste un lieu de préservation et de conservation des espèces et des habitats. Mais on travaille avec les acteurs du tourisme et les acteurs du monde agricole et de la chasse pour qu'ils intègrent des enjeux de conservation dans leurs pratiques.
La création du parc a donc toujours été bien acceptée ?
Il ne faut pas être angélique. Pour les communes du cœur de parc, ça a pu être vécu comme une forme de traumatisme au début car, très concrètement, des activités autorisées avant ne l'ont plus été après. Cela a supposé pour ces communes certains sacrifices. Mais, progressivement, la plupart ont adhéré à la charte du parc (53 communes, sur les 59 pressenties pour faire partie du parc national, ont adhéré à sa charte entre 2013 et 2015, ndlr). Elles ont fini par reconnaître le bénéfice de son action.
Quelle est la plus grande réussite du parc ?
Il y en a plusieurs mais parmi elles, il y a tous les programmes scientifiques qu'on a mis en œuvre. Par exemple, le protocole de suivi de l'impact du réchauffement climatique, avec le programme Alpages sentinelles. Il permet de recueillir des données qui viennent ensuite alimenter des programmes nationaux et européens. Nous sommes pourvoyeurs de données de grande qualité et le parc des Écrins est assez reconnu pour ça. Autre succès : le parc a beaucoup investi dans les technologies d'informations associées à un modèle collaboratif pour mettre à disposition de la donnée au grand public, notamment pour la pratique de la randonnée dans le parc. En lien avec l'Union européenne, d'autres pays répliquent désormais notre modèle de travail.
Quels sont les futurs enjeux ?
Il y a ceux liés au réchauffement climatique. On mesure, on observe et personne ne le nie. Mais c'est très difficile de savoir jusqu'où ça va aller, quels sont les impacts à terme et du coup quelles sont les bonnes mesures à mettre en place. La refonte de la charte prévue pour 2027 est un autre grand enjeu. Elle est en phase d'évaluation et sur la base des résultats, on verra si on doit la réviser ou si on estime qu'elle a été suffisamment bien élaborée pour répondre à l'ensemble des enjeux y compris ceux qui apparaissent. De mon côté je la trouve très exhaustive et je ne suis pas persuadé qu'il faille la réécrire.
Les lacs de la Muzelle et du Lauvitel ou le Pré de Madame Carle sont des sites impactés par une fréquentation excessive. Comment le parc se positionne-t-il ? *
C'est un sujet où il faut sans cesse se remettre en question. Comment articuler les enjeux de conservation et de protection de l'environnement avec les enjeux de développement territorial ? On a vu, après le Covid, des pics de fréquentation qui ont posé pas mal de questions. Est-ce que le parc doit attirer des gens ou au contraire préserver la nature et moins en faire sur le volet communication pour dissuader les gens de venir ? Ce sont ces équilibres qu'il faut sans arrêt questionner pour rassurer les acteurs de la protection de l'environnement et ne pas perdre les autres acteurs du territoire.
* À cette problématique sur les 2 lacs, le parc a répondu fin mai par la création de zones dédiées au bivouac, indiquées sur place.
Des animations pour les 50 ans
Fondé en 1973, le Parc national des Écrins a élaboré pour ses 50 ans un vaste programme d'animations tous publics, particulièrement dense de juin à août : sorties sur le terrain avec des gardes, apéro-sciences, conférences, expositions, randonnées scientifiques, ateliers, concerts, sorties naturalistes...
Programme intégral sur www.ecrins-parcnational.fr