Attention, film (de) malade. Jang Sun-woo, auteur flirtant plus que régulièrement avec l’expérimental, a marqué les esprits avec un triptyque cinématographique perturbant. A Petal (1996) revient avec une violence revendicative sur le massacre de Gwangju, à travers les yeux d’une jeune fille. Timeless, Bottomless, Bad Movie (1998) est une suite de sketchs élaborés en collaboration avec des gamins fugueurs et SDF de Séoul, dans un style visuel punk. Enfin, Fantasmes (1999) ausculte la sexualité de deux partenaires qui se prouveront leur amour de façon pour le moins extrême. Au sortir de ces trois coups d’éclat ayant connu une discrète renommée internationale, Jang Sun-woo se voit confier les rênes d’un gros budget, sur la seule base d’un pitch aguicheur : une relecture de la fable de la petite fille aux allumettes, sous l’angle du jeu vidéo et de sa mise en abîme métaphysique. Au sortir de quatre ans de tournage, de réécriture, d’explosion de budget, de remontage incessant, le film sort sur les écrans coréens. La perplexité devant cet objet foutraque scellera le destin du studio Tube Entertainment, contraint de mettre la clé sous la porte suite aux faibles résultats au box-office national. À la vision du film, la tentation est effectivement énorme de n’y voir qu’un fatras de scènes abracadabrantes, reliées entre elles de façon désinvolte, plombées par des effets spéciaux déjà datés et un second degré déstabilisant. Le tout culminant dans un dernier acte particulièrement imbitable, où l’utilisation des effets numériques confine à une forme de ridicule assumé. Jang Sun-woo a choisi de se laisser porter par son histoire, en explorant la moindre digression passagère avec un jusqu’auboutisme suicidaire. Le résultat est un film bâtard, pleinement conscient de sa monstruosité, qui donne au spectateur ce qu’il était venu chercher (de l’action traitée sous le mode jeu vidéo) en lui rappelant - parfois lourdement - que l’intérêt est ailleurs. Quand Resurrection of the Little Match Girl met de côté son ironie factice et quelque peu poseuse, des scènes magnifiques impriment durablement la rétine (l’escapade meurtrière de la petite fille aux allumettes sur fond d’Ave Maria est l’une des plus belles scènes tournées par son auteur, ce qui n’est pas peu dire).

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