Danse sculptée

Une proposition radicale qui a le mérite d’aller au bout de son propos : voilà comment l’on peut définir Miroku, première des trois pièces de Saburo Teshigawara présentées pendant deux semaines à la MC2. Sur un plateau nu seulement délimité par de grands panneaux blanc servant de toile de projection à différentes sources de lumières bleutées, le chorégraphe et danseur japonais se retrouve seul en scène, une heure durant. Son corps devient donc objet de focalisation à part entière dans une lutte féroce avec le vide, laissant libre court à l’imaginaire. Il est ainsi assez impressionnant de voir Teshigawara se contorsionner, se dénouer, se raidir, comme guidé par des forces extérieures invisibles. En découle alors un spectacle esthétisant à souhait, maîtrisé de bout en bout, qui emporte littéralement ceux qui acceptent de se laisser porter.

Tout comme pour She, l’autre solo de la monographie cette fois-ci interprété par la danseuse Rihoko Sato. Si l’on reste bien ici dans l’univers de Teshigawara décrit plus haut, ce solo prend une dimension supplémentaire grâce à tout l’univers plastique déployé une heure durant. Car quand avec Miroku, le chorégraphe restait dans la suggestion et la continuité, il casse plusieurs fois le rythme ici en enchaînant les tableaux, et en refusant toute transition illustrative, le seul point d’ancrage devenant la danseuse, fabuleuse interprète, sorte de petit Pierrot au masculin. Et l’on croit deviner alors, au vu de cette deuxième pièce, ce que Teshigawara souhaite créer : des spectacles sensitifs jouant pleinement sur l’abandon du spectateur dans ce monde sans repères tangibles.

À corps perdu

Impressions confirmées au vu de Mirror and music, la pièce de groupe (neuf interprètes, dont Rihoko Sato et Saburo Teshigawara eux-mêmes, qui offrent deux solos grandioses à l’intérieur de l’ensemble) dévoilée pour la première fois en France. Avec, là aussi, un travail phénoménal sur la lumière et toutes les possibilités qu’elle offre dans son rapport au corps (on croit deviner que la monographie a été agencée pour aller crescendo). Le tableau central, où les danseurs traversent le plateau nu dans des tournoiements vertigineux, confère au rendu une énergie impressionnante, contrastant avec d’autres parties plus statiques, où le chorégraphe laisse une simple présence humaine sur scène parler d’elle-même. Porté par une musique aux accents baroques, ce Mirror and music clôture ainsi avec grandeur une monographie intéressante puisque qu’elle nous a permis de découvrir un travail original et sincère. On attend donc avec impatience de connaître le nom du chorégraphe international qui sera choisi l’année prochaine – on nous annonce du lourd (on ne manquera pas de vous tenir informé). AM

Trois pièces de Saburo Teshigawara
Du mardi 15 au jeudi 24 février, à la MC2 (Miroku : 15 et 16 ; She : 18 et 19 ; Mirror and music : 23 et 24).

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