Après Aaltra et Avida, Gustave Kervern et Benoît Delépine reviennent avec un film furieux, hirsute, mal élevé, enragé et joyeusement anar. Salutaire, donc.Christophe Chabert
Tout peut entrer dans le viseur des deux cinéastes : les forts (patrons donc, mais aussi actionnaires avides de paradis fiscaux, titulaires de fonds de pension, technocrates bruxellois et néo-ruraux), mais aussi les faibles, qui ont tellement remâché leur honte qu'ils en ont perdu toute identité, sociale mais aussi sexuelle. Car derrière l'explosion d'humour noir (il vaut mieux avoir une légère sensibilité d'extrême-gauche pour apprécier le film !), les caméos délirants (Poelvoorde reconstituant le 11 septembre dans un jardin, Katerine interprétant Jésus Christ mon amour dans un bar glauque ou Dupontel en tueur serbe) et l'anarchisme post-Hara Kiri, Louise-Michel affirme une tendresse inattendue pour les déclassés et les marginaux. La violence agressive et l'envie explicite de bouffer du bourgeois laissent alors la place à une poésie déroutante où la souffrance et le mal à être au monde produisent une certaine mélancolie. Comme si la révolution espérée n'était qu'une utopie vouée à exploser en vol et dont on ne ramasse que des miettes humaines (un enfant, une fratrie ouvrière...). «On l'a fait foirer» disait Peter Fonda dans Easy Rider, un autre road-movie contestataire tourné en... 1968 !Louise-Michel
De Gustave Kervern et Benoît Delépine (Fr, 1h35) avec Yolande Moreau, Bouli Lanners...