Camille Llobet : tours de babil et détours sensibles à l'IAC

Camille Llobet

Institut d'Art Contemporain

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Art contemporain / L’Institut d’Art Contemporain consacre à Camille Llobet une importante et très réussie exposition monographique. À travers, surtout, des vidéos mises en espace, l’artiste nous convie à un partage du sensible, et à la découverte de singulières modalités d’expressions.

Des corps cadrés serrés dans des espaces sombres et vides (studios d’enregistrement, salle de spectacle, ou même l’intérieur de la pile d’un pont…), des visages hyper concentrés sur ce qu’ils perçoivent à l’extérieur ou à l’intérieur d’eux-mêmes, des corps effectuant des gestes ou des vocalises qui tentent de traduire avec précision ces perceptions… Ainsi pourrait-on décrire une grande partie des films vidéos que Camille llobet présente à l’Institut d’Art Contemporain.

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Au sein d’un parcours lui-même pensé comme un volume en clair-obscur visant à intensifier nos perceptions de spectateur, on découvre toute une série de corps en action, énigmatiques, dont le sens des mouvements échappe, mais dont la présence et l’expressivité frappe immédiatement et fortement ! Des corps parlent donc à notre corps, sans que l’on sache bien de quoi (l’exposition se propose en un aller-retour, avec un aller sans trop d’informations – juste des titres d’œuvres et quelques mots évocateurs, et un retour avec un document décrivant le contenu des scènes filmées), mais intuitivemen, « ça nous parle ». Et si ces corps sont dépouillés à l’extrême (presque jusqu’à l’abstraction) et cadrés dans une très grande proximité, ce n’est nullement pour nous en dévoiler l’intimité mais la sensibilité. L’exposition se propose littéralement comme un partage du sensible, passant par le regard, la voix chantante, les gestes, la posture, entre performeurs et spectateurs.

Terrains d’expressions

« Chaque œuvre commence par une rencontre et un questionnement à expérimenter ensemble. J'imagine d'abord des dispositifs de tournage précis prenant le parti de l'expérience filmée et réalise ensuite des montages vidéo et sonore à la fois intuitifs et visant une radicalité formelle » écrit Camille Llobet sur son site d’artiste. Ces rencontres, nous précise-t-elle, sont « autant d’explorations de territoires étrangers, comme par exemple ceux de la langue des signes, de la voix et du chant d’une soprano, de l’alpinisme ou du sport de haut niveau… »

En parcourant l’exposition à l’envers et avec une feuille de salle en main, on apprend ainsi qu’une soprano professionnelle restitue les babils et les interjections d’Alice, la fille de l’artiste. Que des sportifs de haut niveau (escalade, course automobile, ski…) répètent mentalement, et en quelques gestes minimalistes, une séquence clef de leur sport. Qu’une femme sourde, aux côtés d’un chef d’orchestre, décrit en langage des signes et en gestes expressifs ce qu’elle perçoit de la musique exécutée par l’orchestre. Que des paires de performeurs restituent une scène du film Pickpocket de Robert Bresson…

Sous le signe de Bresson

Robert Bresson est l’une des influences majeures de Camille Llobet : épuration de la gestuelle jusqu’à l’abstraction, répétition des mouvements jusqu’à l’épuisement et à l’hypnose, attention aux détails, sobriété des dispositifs filmiques…

Camille Llobet nous propose un rapport au corps et à son expressivité qui se veut à la fois direct, radical, épuré. Un corps sans texte qui nous "parle" seulement par des images (visuelles, sonores, kinesthésiques) et des formes gestuelles, émises dans un moment de forte concentration et après moult répétitions. Contournant le langage verbal, l’artiste explore, isole et compose avec des langages autres, sensibles, physiques. Ses vidéos ressemblent à des volumes sculptés, dont la contemplation touche en nous une sensibilité d’avant la parole, ou hors parole. Soit de singuliers corps parlants, sans parole.

Camille Llobet, Fond d’air
À l'Institut d’Art Contemporain à Villeurbanne jusqu’au dimanche 28 mai


Bio express

1982 : Naissance à Bonneville. Actuellement, Camille Llobet vit entre Sallanches et Paris

2007 : Diplômée de l’École supérieure d’art d’Annecy

2007 : Participe à l’exposition collective Travaux en cours au Musée d’Art Moderne de Saint-Étienne

À partir de 2010 : premières expositions personnes à Lyon, Villeurbanne, Vénissieux

2023 : Exposition monographique Fond d’air à l’IAC de Villeurbanne

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