Photographie / Pour la troisième exposition dans son nouvel espace rue Burdeau, le collectif né en 2001 tente non seulement une récapitulation de sa production documentaire, mais aussi une interprétation du monde d'aujourd'hui.
Deux concepts accompagnent la découverte de l'exposition Apogée : décadence et collectif. Si le deuxième s'incarne dans l'histoire d'Item depuis presque un quart de siècle, le premier semble hanter la réflexion récente du collectif ou, du moins, le regard que celui-ci porte courageusement sur sa propre production.
Une interrogation philosophique tourmente le texte que les commissaires Bertrand Gaudillère et Clément Saccomani ont rédigé pour l'occasion : « Sommes-nous collectivement à un moment charnière, à un point de basculement ? ». Soudain, le regard se posant sur les images murales de la galerie se charge d'un doute existentiel qui lie l'être et l'autrui, la singularité et le monde, à la recherche de quelques indices justifiant la finitude flottant au-dessus des photos.

La fin du monde (des images) ?
Bribes provenant des quatre coins du monde, dépourvues de légendes mais accompagnées par des textes qui compliquent l'énigme, les photos exposées ne dépeignent pas une cartographie exhaustive du réel mais proposent en revanche des éléments pour une herméneutique, comme une tentative de faire parler les signes et découvrir leur sens.
Nous précipitant dans les faits de la réalité sociale, Apogée fait trembler les certitudes, instillant l'image de l'orbite et l'idée que, après avoir atteint le point le plus lumineux, notre société se trouve inévitablement face à sa trajectoire descendante.
Ces images troublent car dans l'esthétique fascinante et saturée s'insinue la tentation d'en finir avec la photographie, de s'en débarrasser pour toujours. Témoignages d'une démarche de reportage liminal au-delà duquel rien n'est possible, les photos d'Apogée révèlent le trait impersonnel qui relie tout regard se posant sur elles.

L'impersonnel et le collectif
Ces "dernières images" semblent faire écho au "dernier mot" de Maurice Blanchot, ce "il y a" qui marque la fin de l'ego, la disparition élocutoire de l'auteur, ouvrant la possibilité non pas à la neutralité, mais à l'incarnation d'une altérité insaisissable et pourtant partagée.
Les photos s'exposent, se soustrayant à la nécessité définitoire, car le collectif l'emporte sur le singulier, la philosophie sur une seule parole, le projectuel sur la démarche égotique. Ce qui fait la force non seulement de cette exposition mais du travail mené depuis des années par l'équipe d'Item, c'est l'aspect choral, entendu comme une résonance fragmentaire mais traçant à la fois un parcours irréductible, documentant le monde malgré les torsions autoritaires et antihumanistes qui le traversent.

Apogée par le Collectif Item
Jusqu'au 6 décembre à Item la galerie (Lyon 1er) ; entrée libre