La Laverie : Le sens de la fête

La Laverie : Le sens de la fête

Portrait / Depuis sa création en 2016, l'association La Laverie investit et enchante l'espace public stéphanois au gré d'événements qu'elle monte de toutes pièces, mettant les arts de rue à l'honneur avec un enthousiasme communicatif. Rencontre avec une équipe qui ne manque ni d'idées ni de projets, en pleine préparation d'un nouveau festival.

Rendez-vous m'est donné en début d'après-midi au 45 de la rue Etienne Boisson, pile en face de la place de la Cartonnerie dont les murs sont recouverts de grafs. On aperçoit au loin les arches du viaduc de Carnot. Sur le portail gris du bâtiment, un panneau annonce la couleur, listant les compagnies, artistes ou artisans qui cohabitent ici. Je traverse un passage couvert encombré de cartons, de sacs et de planches, me faufilant entre un vélo et un caddie d'hypermarché pour déboucher sur une cour cernée de dépendances. Me voilà dans l'antre de Toc Toc Toc, collocation d'une quinzaine de personnes, des photographes un peu vidéastes (Maxime Disy, Alexandre Beltran, Marine Delcroix, Benoît Gomez-Kaine), des musiciens un peu régisseurs (Steve Ollagnier, Renga), un plasticien un peu texan (Brandon Schreck), un ferronnier d'art un peu touche-à-tout (Gabriel Aguiar), le Collectif Topotrope (Julio Bescos et Alexandra Caunes) et bien sûr La Laverie, dont l'équipe m'accueille en toute décontraction.

Joyeux foutoir

En ce second jour du printemps, nous profitons de la douceur retrouvée pour prendre le café à l'extérieur, où des plantes poussent dans des pneus de voiture. Véritable cabinet de curiosités, la cour intérieure prend des airs de caverne d'Ali Baba, comme une immense chambre d'ados attardés qui n'auraient rien jeté depuis leur tendre enfance. Accumulation d'objets en tous genres, qui ont servi ou serviront. Ici et là une rame, un poupon dans une cage à oiseau, une boule à facettes sur un bar en fer forgé, un cône de chantier, une antique machine à écrire, une cible et ses fléchettes, une table de ping-pong, un barbecue bricolé, d'étranges créatures en métal dont une araignée géante aux aguets sur un appentis, un bouquet de fleurs en plastique, un téléphone orange... Il faut lever les yeux pour découvrir de superbes éclairages vintages bleus, suspendus à quelques mètres du sol. Une fois n'est pas coutume, nous commencerons par la photo. Les deux salariés de La Laverie, Jérémie et Julie, sont entourés du reste de l'équipe : Clémentine, Pauline, Bérengère et Fred. Seule Adèle est absente.

Par tous les moyens légaux

Si Julie est la petite nouvelle de la bande, Jérémie était lui de la première heure. L'histoire de La Laverie débute en avril 2016 autour d'une poignée de copains, habitués des festivals d'Aurillac et de Chalon-sur-Saône. Constatant que les arts de rue sont quasiment absents du paysage culturel stéphanois, Jérémie, Fred et Gabriel aménagent l'ancienne laverie industrielle de la rue Ferdinand Prolongée, près de la gare de Châteaucreux, pour y organiser une première soirée. « Les trois semaines de travaux ont été largement récompensées car l'ambiance et les retours ont été très positifs. On s'était tellement éclaté à organiser cet événement, que l'on a rapidement eu envie de poursuivre l'expérience. » La même année, sept autres événements seront créés, en soirées ou sur des dimanches après-midi, permettant à l'équipe de se faire la main et de se structurer de façon pérenne. «  Depuis que nous sommes venus installer notre camp de base ici à la Cartonnerie en 2017, nous montons plusieurs fois par an des événements itinérants dans différents quartiers de Saint-Étienne, dans le but de mettre un petit grain de folie dans l'espace public. » En huit ans, l'équipe a organisé une trentaine de temps forts avec, toujours en ligne de mire, les objectifs qu'elle s'était fixés : favoriser la pratique, la création, la diffusion et le rayonnement des arts plastiques, des spectacles vivants et des arts de rue, sous toutes leurs formes et par tous les moyens légaux.

Les idées à la con

Au-delà des compagnies invitées, La Laverie n'est jamais en reste d'idées décalées pour bâtir sa programmation. Des combats de lutte mexicaine aux lancers de napperons sur télévision, du calendrier de l'avent par les fenêtres aux balades urbaines en mythorama, l'équipe a cette particularité de mener à bout les idées à la con qui surgissent généralement à l'apéritif, entre deux bières et trois bretzels. « Il y a entre nous une vraie émulation, nous ne nous fixons pas vraiment de limites. Ensuite, il faut juste trouver les solutions aux contraintes techniques, lorsqu'il faut barrer une rue, faire livrer un camion de sable, trouver du courant... » Soutenue par la ville, le département et la région, La Laverie compte à hauteur de 30% de son budget sur la buvette et les entrées. « Les premiers temps, les tarifs étaient joués aux dés par les spectateurs. Depuis nous avons opté pour le principe du prix libre qui est un prix conscient : chacun a la possibilité de réfléchir à la valeur de ce qui lui est proposé, chacun peut s'impliquer comme il le souhaite dans le financement l'événement, selon ses moyens. Ce n'est évidemment pas du tout la même approche que la gratuité. » Brassant des disciplines artistiques très variées, les événements créés par La Laverie se déroulent le plus souvent au niveau de la rue, brassant du même coup les publics dans une ambiance de kermesse familiale ou de fête foraine. C'est aussi là que se vit l'esprit populaire d'un grand village stéphanois à taille humaine.

Mais vous êtes fous ? Oh oui !

Du 24 avril au 3 mai sur la place Chavanelle et alentour, La Laverie proposera ainsi un tout nouvel événement, un festival hybride et débridé bâti autour de spectacles, concerts, arts de rue, projections et rencontres. Symphonique et siphonné proposera en effet d'explorer toutes les gammes de la folie (de celle qui pousse à la création à celle qui enferme), de s'amuser et de discuter en s'affranchissant de la norme. « Nous allons déployer un grand chapiteau coloré sur la place. Il y aura une buvette avec des boissons régionales mais pas de restauration. La place ne manque pas de bonnes adresses à tous les prix. » Le festoche promet de rayonner sur tout le quartier, square Jean Cocteau, rue de la Charité, au Remue-Méninges, aux Limbes, au Hot Spot Coffee, jusqu'à la place Jean Jaurès... L'événement sera à prix libre, à l'exception des projections au Méliès. Dj sets et autres surprises complèteront une programmation déjà riche de propositions.

 

Exergue : « Il y a entre nous une vraie émulation, nous ne nous fixons pas vraiment de limites. »

 

Symphonique et siphonné 

Spectacles et concerts :

Le délirium du papillon

Jean-Marie Massou... 

Histoire intime d'Elephant Man

Regards en biais

Fantazio

La mare où l'on se mire

La grande valse brillante

The Very Big Experimental Toubifri Orchestra

Infescticide

Projections :

Comme le poisson qui cherchait l'eau

Sur l'Adamant

Courts-métrages

Ecoutes collectives et discussions :

Barge, 10 ans de vie en sons

Entrer en relation et sortir du mythe

Charge, j'ouvre le huis clos psychiatrique

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