Chalut
B.S Johnson /Quidam Éditeur (Traduit de l'anglais par Françoise Marel)
Chalut est le troisième roman de B.S Johnson que Quidam Éditeur propose en traduction française après R.A.S. Infirmière-Chef, une comédie gériatrique et Christie Malry règle ses comptes. Trois livres qui confirment l'importance de cet auteur qui a, dans les années soixante, dynamité la littérature britannique en étant l'un des principaux tenants (avec John Fowles) d'un post-modernisme se situant dans la lignée d'un Nabokov ou d'un Borges et trouvant écho dans le Nouveau roman français et la «surfiction» américaine. Une manière de déconstruire les règles romanesques issues du XIXe siècle et de tourner le dos à une littérature de fiction pour lui préférer une écriture de la «vérité»: «Cela ne m'intéresse pas de raconter des mensonges dans mes propres romans. Pour moi, une distinction opératoire entre la littérature et les autres formes d'écriture, c'est que la littérature nous apprend quelque chose de vrai sur la vie : et comment raconter quelque chose de vrai à travers la fiction ?». C'est précisément cette quête de vérité qui habite Chalut, publié et récompensé du prix Somerset Maugham en 1966, un roman constitué du long monologue intérieur que déroule le narrateur (lui-même) alors qu'il est embarqué sur un navire pour une croisière de plusieurs semaines. Ce soliloque, seulement entrecoupé ça et là de quelques «points de suspension», constitue une plongée lyrique et obsédante dans l'esprit malade d'un homme qui tente de revenir sur ses principales expériences passées en inventant (comme une relique, non comme un mensonge) ses propres souvenirs. Suicidé à l'âge de quarante ans après une carrière littéraire fulgurante, B.S Johnson a décidément tout de l'écrivain culte... YN