Sunshine

Mercredi 25 avril 2007

Un beau film de SF humaniste qui interroge les peurs existentielles d'une poignée de professionnels de l'espace avec un mélange risqué de naïveté scénaristique et d'abstraction visuelle.Christophe Chabert

Avec 28 jours plus tard, Danny Boyle confirmait ce que l'on devinait déjà dans son sous-estimé La Plage : il a trouvé en la personne de l'auteur Alex Garland un complice pour inventer des récits où la question qui taraude son cinéma (la recherche d'un espace commun dans un monde sans repères) se couple avec son désir de revisiter les genres et d'expérimenter niveau mise en scène. Utopie d'un village global condamnée par l'individualisme occidental (La Plage), reconstruction du lien social dans une situation de chaos (28 jours plus tard) et aujourd'hui, avec Sunshine, conflit entre la finitude de l'homme et sa responsabilité vis-à-vis de l'humanité, les ambitieuses réflexions de Boyle et Garland se déploient toujours dans des cadres codifiés, récit d'aventures, film d'horreur ou space opera. Avec une confiance casse-cou dans la portée de leur propos, ils peuvent ainsi ménager spectaculaire et abstraction, naïveté adolescente et désir d'élever le débat au-dessus de l'entertainement pour débiles mentaux.I comme IcareL'argument de Sunshine (une équipe de spationautes vont rallumer un soleil moribond à l'aide d'une charge nucléaire), est du genre neuneu. D'ailleurs, la capacité à dédramatiser l'importance de l'enjeu dans les très contemplatives premières séquences suggèrent au spectateur avide de péripéties qu'il peut aller voir ailleurs. Et chaque fois que Boyle se lance dans une scène à faire, il déborde le cadre de l'histoire racontée par un feu d'artifice visuel qui pourrait être saoulant s'il n'était avant tout d'une grande beauté plastique. Sans oublier une réelle intelligence de cinéma qui s'affine de films en films : plutôt que de privilégier un membre de l'équipe (même si l'excellent Cillian Murphy a d'évidence ses faveurs), le cinéaste, fidèle au grand principe édicté par Howard Hawks, les montre comme un corps unique de professionnels compétents, dont les fragilités individuelles sont compensées par la conscience de la mission à accomplir. C'est par cette porte-là que Sunshine déploie son attirail philosophique et mythologique : il y a effectivement des Icares dans cette mission Icarus, des êtres dont l'orgueil les pousse à se croire prêt à défier Dieu - c'est la partie slasher du film, pas forcément la meilleure. Mais il y a aussi en vis-à-vis une observation juste des doutes et faiblesses de l'homme ordinaire qui prend la mesure de sa place et de son rôle dans l'univers. Naïve, cette philo de terminale en fera sourire certains ; elle est quand même autrement plus digeste que le verbiage techno-geek de The Fountain car elle ne passe que par les images, époustouflantes et lyriques, et jamais par les dialogues, minimalistes. En l'état, Sunshine est un film qui a de la gueule et un cerveau ; ça nous suffit, pour l'instant.Sunshinede Danny Boyle (Ang-ÉU, 1h40) avec Cillian Murphy, Chris Evans...