Primer

Mercredi 28 février 2007

de et avec Shane Carruth (2004, ÉU, 1h42) avec David Sullivan, Casey Gooden...

On a le sentiment qu'on nous a déjà fait le coup. Un petit malin traumatise le monde du cinéma indépendant américain avec un film de SF mathématiques-friendly, dont l'ambition n'a d'égale que l'étroitesse de son budget. Comme ses inévitables référents (Pi et Cube), Primer noie le spectateur sous un jargon scientifique avant de lancer l'intrigue - un parti pris d'autant plus déstabilisant qu'il illustre les expériences menées par deux types dans un garage, à l'aide de tôles, d'une poignée de circuits imprimés, et de quelques bombonnes. Pour être franc, on est tout de même très loin du "2001 du cinéma indépendant" dont parlent ses amateurs les plus fervents. Mais pour peu qu'on succombe à cette bonne vieille suspension d'incrédulité, on se laisse volontiers perdre dans la narration alambiquée de ce film retors. Grâce en particulier aux performances impeccables des comédiens, et à une mise en scène intuitive sauvant la narration du marasme redouté. Shane Carruth ménage ses effets, donne l'impression de ne pas trop savoir où aller - avant de basculer pour de bon dans la science-fiction. À partir de là, le réalisateur développe un univers cinématographique paranoïaque, louvoie avec un malaise indicible où chaque image semble mentir - ou receler une vérité qui nous échappe (faute de diplôme en physique). L'avenir nous dira si ce sentiment était dû à un coup de chance fortuit ou à un véritable talent d'auteur. En l'état, Primer ressemble à un film de premier de la classe, aussi génial qu'énervant dans son opacité délibérée.François Cau