Je pense à vous
de Pascal Bonitzer (Fr, 1h22) avec Edouard Baer, Géraldine Pailhas, Marina De Van...
S'il est un cinéaste en France qui s'entête à maintenir vivaces les clichés sur le cinéma national, c'est bien Pascal Bonitzer : personnages bavards, piqués dans la frange la plus intello de la société, tracassés par leurs histoires de cœur et de cul, sourds au devenir du monde... Je pense à vous n'échappe pas à la règle, et ce chassé-croisé entre deux couples gangrenés par leurs névroses, manipulés par un écrivain égocentrique et frustré, accumule les clichés avec une obstination kamikaze (jusqu'à la scène de ménage aux jardins du Luxembourg !). Ainsi, la première partie atteint parfois des pics d'ésotérisme, notamment les références incompréhensibles à la judéité. Même les fans hardcore d'Édouard Baer seront interloqués face à la prestation sobre jusqu'à l'insignifiance de cet acteur dément... Cela étant, les courageux qui dépasseront ce cap seront un peu récompensés, car dans son dernier mouvement le film atteint une forme de noirceur absolue, comme si ces personnages détestables effectuaient à l'écran une singulière autocritique, ou plutôt atteignaient une forme radicale d'autodestruction. Pas de pirouette finale, pas de rédemption possible : ce monde vide où l'on communique comme dans le cabinet d'un psy est renvoyé à son propre néant, à sa sombre dérision. Cela ne fait pas forcément un bon film, mais l'honneur du cinéaste est, cette fois-ci, à peu près sauf. CC