La Méthode
de Marcelo Piñeyro (Esp-Arg, 1h55) avec Eduardo Noriega...
À l'origine de cette Méthode, nouveau film de Marcelo Piñeyro, remarqué avec Vies brûlées et Kamchatka, une pièce de théâtre où sept candidats se rendent à un entretien d'embauche où ils doivent s'éliminer les uns les autres à travers une série d'épreuves graduellement féroces. Le film respecte cette construction, chaque acte étant donc conclu par la "disparition" définitive d'un des personnages. Si la visée de Piñeyro est le monde impitoyable de l'entreprise (démonstration soulignée par la rumeur du grand rassemblement anti-G8 dans les rues de Madrid, dont on voit même quelques images documentaires au début du film), La Méthode renvoie plutôt dans son dispositif, à la fois ludique et cruel, aux scénarios de télé-réalité : un casting de personnages archétypaux (jeune loup arrogant, mère de famille quadra, "leader" trop vite désigné, grande gueule débonnaire, etc) dont les alliances et les trahisons fournissent la pâte narrative du film. Mais là où la télé-réalité laisse une place à la météo imprévisible des caractères, La Méthode fait de ses personnages les pantins d'un scénario déterministe, plus malin que véritablement malade. Le pessimisme habituel de Piñeyro, trop synchrone avec cette petite mécanique, ainsi que ses évidentes qualités de cinéaste (notamment une direction d'acteurs au cordeau), ne font que renforcer cette sensation de contrôle asphyxiant, comme si le discours du film était neutralisé par sa forme même. Le thriller psychologique annoncé ne se joue plus alors au niveau des hommes et des femmes bafoués par le libéralisme, mais du point de vue du système lui-même. Christophe Chabert