Isolation
Méfiez-vous des OGM ! Une expérimentation hasardeuse sur des bovidés aboutit à la naissance de créatures monstrueuses dans une ferme irlandaise. Nikita Malliarakis
Les réalisateurs de films d'épouvante devraient prendre davantage en considération le décor de la campagne irlandaise : temps pluvieux, ciel limpide et lourd et prairies verdoyantes sont des éléments à la fois puissants et paradoxaux pour créer une ambiance oppressante où couvent des violences rentrées. Plus que des héros pourtant bien campés, c'est l'Irlande elle-même qui semble parfois être la vraie vedette d'Isolation, film d'horreur bien troussé que le jury du festival de Gérardmer a gratifié d'un grand prix plus que mérité. Réalisé par Billy O'Brien, cinéaste jusqu'ici inconnu dans nos contrées, cet exercice d'épouvante champêtre a pour principales qualités un respect intégral et dépourvu de second degré du genre choisi : étouffant, grouillant de sombres menaces, l'univers d'Isolation est un bonheur pour les amateurs de frissons horrifiques premier degré.L'attaque des veaux mutants L'action se déroule dans une ferme irlandaise isolée et au bord de la ruine : poussé par le manque d'argent, le propriétaire des lieux a accepté de laisser un savant et sa collaboratrice mener d'obscures expériences génétiques sur des vaches, afin de les rendre plus fertiles. Mais les bidouillages de notre nouveau Dr Moreau auront des effets aussi inattendus que redoutables. Les héros (auxquels s'adjoint un couple de routards venus squatter le terrain) parviendront-ils à déjouer l'obscure menace qui pèse désormais sur la ferme ? La force d'Isolation réside en grande partie dans la modestie de ses ambitions, inséparable de son respect du genre horrifique. Billy O'Brien n'a d'autre but que de réaliser un film d'ambiance nerveux et angoissant : de ce point de vue, son contrat avec le public est amplement rempli. Le choix de comédiens sobres aux fortes présences contribue à la crédibilité d'une intrigue au nombre réduit de protagonistes, mais c'est la mise en scène qui se révèle l'atout essentiel de la réussite de l'œuvre. Filmant en émule doué de John Carpenter, O'Brien passe d'une première partie au réalisme oppressant à une conclusion dont le caractère fantastique, intelligemment illustré, ne tranche nullement avec le reste. Isolation est un véritable film organique : de l'herbe grasse aux remugles de chair des mutations, en passant par l'imposante présence des bovidés, c'est une nature épaisse, sensuelle et poisseuse qui envahit l'image, écrasant les protagonistes de sa présence avant de se révolter avec violence contre les apprentis sorciers. Si le point de départ du film n'est pas particulièrement innovant, il est soutenu par un sens très sûr du suspense et de l'horreur qui laissent deviner chez Billy O'Brien un authentique talent de maître de l'épouvante. L'avenir nous donnera peut-être raison ; en attendant, il serait dommage de bouder cet intéressant spécimen d'horreur bovine ! Isolation de Billy O'Brien (Ir-GB, 1h35) avec John Lynch, Ruth Negga, Essie Davis, Sean Harris, Marcel Iures...