The Saddest music in the world

Publié Mercredi 1 mars 2006

de Guy Maddin (Canada, 1h39) avec Isabella Rossellini, Maria de Medeiros, Mark McKinney...

L'histoire se déroule en 1933 à Winnipeg, dans le fin fond du Canada, au cœur de la Grande Dépression. Sentant l'heure de la levée de la Prohibition proche, Lady Port-Huntly (magnifique Isabella Rossellini), baronne locale de la bière, ancienne femme superbe et convoitée qui a perdu ses jambes dans un "accident", lance le concours de la musique la plus triste du monde. La belle (ou ce qu'il en reste) part d'un constat simple : plus les gens sont malheureux et plus ils boivent. Avec 25 000 dollars à la clé, un battle de musique totalement halluciné draine les foules vers cet improbable lieu. Les pays s'affrontent, les gagnants plongent dans des piscines de bière tandis que les américains, privés d'alcool, suivent en direct le concours à la radio. Guy Maddin n'oublie rien ni personne, de la vieille femme-sorcière effrayante détentrice de la vérité, au mélange de noir et blanc et de couleur ; il est un magicien surpris en pleine invention de conte de fées pour les grands : des méchants, des gentils, des jambes de verre, un juste retour des choses à la fin avec bien sûr la réalisation de la prophétie. L'ambiance surréaliste qui règne de la première image embrumée à la scène finale est portée par l'omniprésence de la musique. Guy Maddin se nourrit de handicaps et d'insolite pour régurgiter un cinéma inattendu, drôle, impossible à dater et tout bonnement sidérant. Les afficionados auront le plaisir de retrouver les grandes questions sur le souvenir, la quête du passé et le personnage amnésique (accessoirement nymphomane), qui retrouve la mémoire "et se rend compte qu'il était faillible", selon les mots du réalisateur. Présenté au dernier festival de Venise, The Saddest music in the world est le septième long métrage du réalisateur, porté par la volonté de s'ouvrir à un plus large public. Les volontés de Guy Maddin sont des ordres et ce serait bien dommage de s'en priver. DA